Page:Hugo - L'Homme qui rit, 1869, tome 4.djvu/126

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y a l’ivresse, et il y a l’ivrognerie. L’ivresse, c’est de vouloir une femme ; l’ivrognerie, c’est de vouloir la femme.

Gwynplaine, hors de lui, tremblait.

Que faire contre cette rencontre ? Pas de flots d’étoffes, pas d’ampleurs soyeuses, pas de toilette prolixe et coquette, pas d’exagération galante cachant et montrant, pas de nuage. La nudité dans sa concision redoutable. Sorte de sommation mystérieuse, effrontément édénique. Tout le côté ténébreux de l’homme mis en demeure. Ève pire que Satan. L’humain et le surhumain amalgamés. Extase inquiétante, aboutissant au triomphe brutal de l’instinct sur le devoir. Le contour souverain de la beauté est impérieux. Quand il sort de l’idéal et quand il daigne être réel, c’est pour l’homme une proximité funeste.

Par instants la duchesse se déplaçait mollement sur le lit, et avait les vagues mouvements d’une vapeur dans l’azur, changeant d’attitude comme la nuée change de forme. Elle ondulait,