Page:Hugo - L'Homme qui rit, 1869, tome 4.djvu/422

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dans ma robe. Tantôt en la mettant je pensais bien que ce serait mon suaire. Je veux la garder. Il y a des baisers de Gwynplaine dessus. Oh ! j’aurais pourtant bien voulu vivre encore. Quelle vie charmante nous avions dans notre pauvre cabane qui roulait ! On chantait. J’écoutais les battements de mains ! Comme c’était bon, n’être jamais séparés ! Il me semblait que j’étais dans un nuage avec vous, je me rendais bien compte de tout, je distinguais un jour de l’autre, quoique aveugle, je reconnaissais que c’était le matin parce que j’entendais Gwynplaine, je reconnaissais que c’était la nuit parce que je rêvais de Gwynplaine. Je sentais autour de moi une enveloppe qui était son âme. Nous nous sommes doucement adorés. Tout cela s’en va, et il n’y aura plus de chansons. Hélas ! ce n’est donc pas possible de vivre encore ! Tu penseras à moi, mon bien-aimé.

Sa voix allait s’affaiblissant. La décroissance lugubre de l’agonie lui ôtait l’haleine. Elle repliait son pouce sous ses doigts, signe que la