Page:Hugo - Légende des siècles, Hachette, 1920, 1e série, volume 2.djvu/76

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Et des champs ravagés et des clairons soufflant,
Et l’Europe livide ayant un glaive au flanc ;
Des vapeurs de tombeau, des lueurs de repaire ;
Cinq frères tout sanglants ; l’oncle, le fils, le père ;
Des hommes dans des murs, vivants, quoique pourris ;
Des têtes voletant, mornes chauves-souris,
Autour d’un sabre nu, fécond en funérailles ;
Des enfants éventrés soutenant leurs entrailles ;
Et de larges bûchers fumaient, et des tronçons
D’êtres sciés en deux rampaient dans les tisons ;
Et le vaste étouffeur des plaintes et des râles,
L’Océan, échouait dans les nuages pâles
D’affreux sacs noirs faisant des gestes effrayants ;
Et ce chaos de fronts hagards, de pas fuyants,
D’yeux en pleurs, d’ossements, de larves, de décombres,
Ce brumeux tourbillon de spectres, et ces ombres
Secouant des linceuls, et tous ces morts, saignant
Au loin, d’un continent à l’autre continent,
Pendant aux pals, cloués aux croix, nus sur les claies,