Page:Hugo - La Légende des siècles, 1e série, édition Hetzel, 1859, tome 2.djvu/224

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C’est un inexprimable et surprenant vaisseau,
Globe comme le monde et comme l’aigle oiseau ;
C’est un navire en marche. Où ? Dans l’éther sublime !

Rêve ! on croit voir planer un morceau d’une cime ;
Le haut d’une montagne a, sous l’orbe étoilé,
Pris des ailes et s’est tout à coup envolé ?
Quelque heure immense étant dans les destins sonnée,
La nue errante s’est en vaisseau façonnée ?
La Fable apparaît-elle à nos yeux décevants ?
L’antique Éole a-t-il jeté son outre aux vents ?
De sorte qu’en ce gouffre où les orages naissent,
Les vents, subitement domptés, la reconnaissent !
Est-ce l’aimant qui s’est fait aider par l’éclair
Pour bâtir un esquif céleste avec de l’air ?
Du haut des clairs azurs vient-il une visite ?
Est-ce un transfiguré qui part et ressuscite,
Qui monte, délivré de la terre, emporté
Sur un char volant fait d’extase et de clarté,
Et se rapproche un peu par instant, pour qu’on voie,
Du fond du monde noir, la fuite de sa joie ?

Ce n’est pas un morceau d’une cime ; ce n’est
Ni l’outre où tout le vent de la Fable tenait ;
Ni le jeu de l’éclair ; ce n’est pas un fantôme
Venu des profondeurs aurorales du dôme ;