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LA DÉCROISSANCE CRÉPUSCULAIRE.

Basque revint, posa sur la cheminée une bougie allumée et se retira. Jean Valjean, la tête ployée et le menton sur la poitrine, n’aperçut ni Basque, ni la bougie.

Tout à coup, il se dressa comme en sursaut. Cosette était derrière lui.

Il ne l’avait pas vue entrer, mais il avait senti qu’elle entrait. Il se retourna. Il la contempla. Elle était adorablement belle. Mais ce qu’il regardait de ce profond regard, ce n’était pas la beauté, c’était l’âme.

— Ah bien, s’écria Cosette, père, je savais que vous étiez singulier, mais jamais je ne me serais attendue à celle-là. Voilà une idée ! Marius me dit que c’est vous qui voulez que je vous reçoive ici.

— Oui, c’est moi.

— Je m’attendais à la réponse. Bien. Je vous préviens que je vais vous faire une scène. Commençons par le commencement. Père, embrassez-moi.

Et elle tendit sa joue.

Jean Valjean demeura immobile.

— Vous ne bougez pas. Je le constate. Attitude de coupable. Mais c’est égal, je vous pardonne. Jésus-Christ a dit : Tendez l’autre joue. La voici.

Et elle tendit l’autre joue.

Jean Valjean ne remua pas. Il semblait qu’il eût les pieds cloués dans le pavé.

— Ceci devient sérieux, dit Cosette. Qu’est-ce que je vous ai fait ? Je me déclare brouillée. Vous me devez mon raccommodement. Vous dînez avec nous.