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sur le Luxe.

à critiquer leurs contemporains, à blâmer les mœurs & les usages du tems présent, & à exalter les vertus réelles ou prétendues de leurs ancêtres. Les écrits des siecles éclairés & policés étant les seuls qui passent à la postérité, il n’est pas étonnant que nous trouvions, dans les auteurs les plus estimés, un si grand nombre d’arrêts séveres prononcés, non-seulement contre le luxe, mais même contre les sciences : le respect qu’on nous inspire pour ces auteurs éclairés, joint à l’inclination naturelle à tous les hommes de censurer leurs concitoyens, nous fait adopter leurs sentimens ; il seroit cependant facile de détruire cette erreur, & de rendre un jugement impartial, en faisant la comparaison de quelques peuples contemporains, dont on mettroit les mœurs en opposition. On ne peut, en effet, s’empêcher de reconnoître que la trahison & la cruauté, les plus detestables de tous les vices, semblent être particulierement affectés aux nations sans police & sans luxe. Les Grecs & les Romains, les plus civilisés de tous les peuples de l’antiquité,