Page:Huysmans - Croquis parisiens.djvu/205

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quarante ans, soigneusement pommadées et la figure très travaillée au plâtre. »

Une vague odeur de prostitution s’échappait de ces magasins où les œillades de la négociante devaient abréger les marchandages des acheteurs. « Allons, le bon enfant disparaît ; d’ailleurs, les centres se déplacent ; maintenant tous les antiquaires, tous les vendeurs des livres de luxe végètent dans ce quartier et ils fuient, dès que leurs baux expirent, de l’autre côté du fleuve. Dans dix ans d’ici, les brasseries et les cafés auront envahi tous les rez-de-chaussée du quai ! Ah ! Décidément Paris devient un Chicago sinistre ! » Et, tout mélancolisé, M. Folantin se répétait : « Profitons du temps qui nous reste avant la définitive invasion de la grande muflerie du Nouveau Monde ! » Et il reprenait ses flânes, s’arrêtant devant les marchands d’estampes aux montres tendues d’images du XVIIIe siècle, mais au fond les gravures en couleurs de cette époque et les gravures à la manière noire anglaise qui les flanquaient, dans la plupart des étalages, ne le passionnaient guère et il regrettait les estampes de la vie intime flamande, maintenant reléguées dans les cartons, par suite de l’engouement des collectionneurs pour l’école française.

Quand il était las de baguenauder devant ces boutiques, il entrait, pour varier ses plaisirs, dans la salle des dépêches d’un journal, une salle garnie