Page:Huysmans - Croquis parisiens.djvu/232

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quand un ami s’attardait, inexact au rendez-vous.

Enfin à six heures un quart, la sonnerie carillonna et un galopin s’avança entraîné, le nez en avant, par le poids d’une grande boîte en fer-blanc, de la forme d’un seau ; M. Folantin aida à distribuer sur la table les assiettes, qu’il découvrit lorsqu’il fut seul. Il y avait un bouillon au tapioca, un veau braisé, un chou-fleur à la sauce blanche.

Mais ce n’est pas mauvais, se dit-il en goûtant à chacun de ces plats, et il se gava de bon appétit, but un peu plus que de coutume, puis il tomba dans une douce rêverie, en contemplant sa chambre.

Depuis des années, il manifestait l’intention de la décorer, mais il se répétait : « Baste ! à quoi bon ? je ne vis pas chez moi ; si plus tard je puis m’arranger une autre existence, j’organiserai mon intérieur. » Mais tout en n’achetant rien, il avait déjà jeté son dévolu sur bien des bibelots qu’il reluquait, en rôdant sur les quais et dans la rue de Rennes.

L’idée d’habiller les murs glacés de sa chambre s’implanta tout à coup en lui, tandis qu’il lampait un dernier verre. Son indécision cessait ; il était déterminé à dépenser les quelques sous qu’il entassait depuis des années dans ce but, et il eut une soirée charmante, réglant d’avance la toilette de son réduit. « Je me lèverai demain, de bonne heure, conclut-il, et j’irai tout d’abord faire un tour chez