Page:Huysmans - Croquis parisiens.djvu/74

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ne fût ce folâtre et rusé compère, grand brasseur de filles et dépuceleur de bouteilles, l’éternel rival d’Arlequin : Pierrot. Il rasait les murs, preste et le regard sournois. Soudain, il fit halte devant une maison, poussa une petite porte, tomba dans un trou noir comme un lys plongé jusqu’à la tige dans un baquet d’encre, puis il reparut dans une cave qui s’alluma au ras du trottoir.

Je vis alors au travers des grillages qui faisaient ventre et dont mainte maille détraquée tordait ses fils en révolte, un carreau poudré de blanc, une rangée de sacs, une hache, une pelle, un pétrin sur lequel s’agitaient, hurlants et blêmes, sans chemises et sans vestes, deux hommes se ruant sur un monceau de pâte qui claquait sourdement, alors qu’elle retombait sur le bois de l’auge.

Ils grondaient, geignaient, criaient des mots inarticulés, poussaient des gémissements à fendre l’âme, battaient à grands coups la purée flasque. Han ! han ! han ! han ! clac ! paf ! h ... an ! et comme une couleuvre dont les anneaux roulent le mastic se tordait sous leurs poings ! Les corps ruisselaient, les boules des biceps dansaient dans les bras, de grosses gouttes de sueur perlaient au front et buvaient la farine amassée aux tempes.

Ils tapaient dans le tas comme des furieux, puis après un dernier cri qu’ils s’arrachèrent des entrailles, les bras cessèrent leurs moulinets ; les