Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/191

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

il se dît que cette course le retarderait trop, que Mélanie, encore indécise peut-être, commettrait à coup sûr une esclandre dans la maison et, le nez en l’air, il flânocha les mains dans ses poches, tâchant de s’intéresser aux moindres choses.

Alors, comme pour justifier les piètres motifs qu’il invoquait, un phénomène singulier se produisît. Le brouillard de sa cervelle se dissipa peu à peu, il démarra de ses pensées sur Blanche et sur sa bonne, et subitement il eut une curieuse éclaircie d’organes. Ses nerfs vibrèrent d’une façon aiguë, et mille détails qu’il n’avait jamais observés, bien qu’il les vit tous les jours, le frappèrent. Il découvrit son quartier d’un coup.

Regardant du haut en bas, les rues, coordonnant soudain des réflexions, qui lui étaient peut-être déjà venues sans suite, il s’aperçut que son quartier était, en majorité, habité par d’anciens notaires, par des restes de la noblesse orléaniste, par d’anciens dignitaires du second Empire, par des avocats à la cour d’appel, par des auditeurs au conseil d’État, par des conseillers référendaires à la cour des Comptes. De là, se dit-il, cet aspect mécontent et rechigné de gens perchés sur des échasses, méditant sur de solennelles fariboles, passant, graves et roides, avec des mines pincées de vieux juges ; les pierres elles-mêmes lui parurent s’ennuyer, imprégnées qu’elles étaient de tout le pédantisme que ces gens dégagent !

La teinte générale, le milieu, le voici donc, pour-