Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/303

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partir, ses vêtements, lui fourrant des foulards dans les poches, le forçant à se déshabiller des pieds à la tête quand il revenait mouillé, par les jours de pluie, se couchant avant lui, l’hiver, pour qu’il s’étendît sur une place chaude.

Ils s’étaient croisés, un soir qu’elle bayait aux corneilles sur un pont ; accostée sous le plus futile des prétextes, elle invita le peintre à passer son chemin. Cyprien avait alors parlé de la fraternité des âmes, mis le bras de la femme sous le sien et, malgré ses refus, il l’avait emmenée, l’éblouissant par d’inintelligibles phrases, lui procurant cette certitude qu’elle était remorquée par un Monsieur qui avait reçu de l’instruction. Elle fut enchantée du reste de l’hospitalité du peintre ; ce furent ces gentillesses de calicots et de perruquiers dont l’effet est toujours sûr. Cyprien y ajouta encore un sans-gêne gracieux qui combla d’aise Mélie, déjà enchantée de ces bonnes façons.

Égayée par des grogs fortement épicés, elle s’apitoya, maternelle, sur les vêtements décousus du peintre, et elle leur posa, çà et là, quelques reprises, quelques points, puis, satisfaite du peu d’exigences et de la générosité de Cyprien, elle revint d’elle-même, plusieurs fois, entrant avec l’air humble d’un chien qui s’attend à être chassé, mais le peintre la laissa rôder, bienveillant, où qu’elle voulut, songeant à l’avenir de sa garde-robe.

Leur liaison continuait ainsi très lénitive et très bénigne, lorsqu’un jour Cyprien se coucha, malade, souffrant