Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/314

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

tra sur un homme pointant au loin. C’est la tournure de Cyprien, se dit-il. Il reconnut bientôt, en effet, la figure du peintre qui approchait rapidement, manœuvrant, par saccades, les milices charnières de ses longues jambes.

La figure d’André s’éclaira ; leurs relations étaient presque interrompues depuis des mois.

— Te voila donc, brigand, fit-il, quand le peintre fut monté, et ils se serrèrent les mains, parlant tous les deux à la fois, se dévisageant, en riant d’aise.

— Mon cher, vois-tu, dit Cyprien, c’est bien simple, je ne suis pas venu parce que tu étais en possession de femme et que les femmes, tu le sais comme moi, ça balaye tout ! Compte les amis que je recevais jadis, dans mon atelier, et ceux que les maîtresses ont éloignés, et la balance s’établira vite. Il ne me reste plus que toi et je ne tiens pas à te perdre.

— Je suis toujours seul maintenant, tu peux me visiter sans crainte, répondit André. Jeanne est partie. Et il expliqua sa rupture, ajoutant avec tristesse que ses prévisions s’étaient réalisées, qu’il n’avait plus reçu de nouvelles de Jeanne depuis qu’elle était débarquée en Angleterre. Et toi, demanda-t-il, secouant la tête comme pour chasser un souvenir importun, que fais-tu ? que deviens-tu ?

— Moi, murmura le peintre avec un peu d’hésitation, eh bien, dame, je deviens… que je vis en concubinage.

André ouvrit de grands yeux et il ne put s’empêcher de rire.