Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/49

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— Eh bien, je t’accompagne, s’écria le peintre. J’ai besoin de respirer. Ça ne va pas ce matin. J’ai le cœur en compote. Ce n’est pas pour dire, mais les familles sont bien inconséquentes ! elles vous lèguent tous les vices héréditaires de leur santé et, de plus, elles vous fichent sur la terre sans le sou ! Au bout de deux générations, je ne sais vraiment pas ce qui peut rester d’un estomac qui va, se détraquant à mesure qu’on le repasse à ses successeurs ! Ça devient de la jolie filasse ! On en est réduit à boire de ce jus-là ! Et Cyprien, sautant de sa couche, but, coup sur coup, de pleins verres d’eau.

— Si je le levais ? dit André, sans conviction.

— Tu ne ferais pas mal, riposta le peintre.

Une fois debout et sa toilette achevée, André se donna un coup de brosse, et, précéda sur le palier Cyprien qui fermait la porte.

André ne souffla mot pendant la route. Il voulait éviter d’avance les questions indiscrètes de la bonne qu’il avait congédiée, la veille même de son mariage. Il était évident qu’elle demanderait des nouvelles de Madame, désirerait connaître les motifs de la rupture, éprouverait le besoin de s’apitoyer sur le sort de son ancien maître. André était résolu à lui raconter simplement que sa femme voyageait, pour cause de maladie, dans les pays chauds.

— Ce n’est pas très fort ce que j’ai inventé, se dit-il, mais enfin, étant donné la bêtise de Mélanie, c’est suffisant.