Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/80

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aux complots des jésuites et aux crimes des démagogues.

Ayant par hasard lu les élogieuses platitudes débitées par les doctrinaires sur l’Amérique, il exaltait les mœurs de cet odieux pays, souhaitait que le nôtre lui ressemblât, prônait les idées utilitaires, les bienfaits de l’instruction, le progrès, les courtes libertés des républiques.

Il aggravait encore ces exorbitantes niaiseries par le ton sentencieux dont il les prononçait ; sa femme restait coite, béait, extasiée, dès qu’il ouvrait la bouche.

De caractère, elle était molle et âpre, tout à la fois ; âpre au gain, molle au plaisir ; elle eût rogné dix centimes sur le manger de chaque jour, dépensé ses économies afin de donner un bal.

Une fille était née tardivement de son union avec M. Désableau, la petite occupée pour l’instant à gâter une image d’un sou. Ils avaient toujours convoité un fils, ils eussent voulu fonder une génération d’employés, imiter ces familles dont tous les rejetons se succèdent interminablement sur la même chaise, vivent et meurent dans une misère crasse, sans même avoir tenté de gagner le large.

C’est, disait M. Désableau, un état peu lucratif mais honorable et puis, c’est aussi une place sûre et, sans hésitation, il ajoutait : nous représentons, en notre qualité de fonctionnaire, la noblesse de la bourgeoisie.

Leurs vœux demeurèrent inexaucés. – Ils n’enfantèrent