Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/155

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Dieu, son cœur éclate, l’enfant Jésus qu’elles ont tant aimé leur apparaît alors si inaccessible et si loin d’elles ! puis sa vue même les consolerait à peine, car elles rêveraient de le tenir dans leurs bras, de l’emmaillotter, de le bercer, de lui donner le sein, de faire, en un mot, œuvre de mère.

D’autres nonnes ne subissent, elles, aucune attaque précise, aucun siège que l’on connaisse ; seulement sans cause définie, elles languissent, meurent tout à coup comme un cierge sur lequel on souffle. C’est l’acedia des cloîtres qui les éteint.

— Mais savez-vous, monsieur l’abbé, que ces détails sont peu encourageants…

Le prêtre haussa les épaules. — C’est le médiocre revers d’un endroit sublime, dit-il ; les récompenses qui sont accordées, même sur cette terre, aux âmes conventuelles sont si supérieures !

— Enfin, je ne suppose pas que lorsqu’une religieuse s’abat, frappée dans sa chair, on l’abandonne. Que fait alors une mère abbesse ?

— Elle agit suivant le tempérament corporel et suivant la complexion d’âme de la malade. Remarquez qu’elle a pu la suivre pendant les années de la probation ; qu’elle a forcément pris un ascendant sur elle ; elle doit donc, dans ces moments, surveiller de très près sa fille, s’efforcer de détourner le cours de ses idées, en la brisant par de pénibles travaux et en lui occupant l’esprit ; elle doit ne pas la laisser seule, diminuer au besoin ses prières, restreindre ses heures d’office, supprimer les jeûnes, la nourrir, s’il le faut, mieux. Dans d’autres cas, au contraire, elle peut recourir à de plus fréquentes