Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/268

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des tablettes dans du papier de plomb, puis, dans une autre pièce, une minuscule machine à vapeur que modérait un convers.

Il gagna cette allée où il avait fumé des cigarettes dans l’ombre. Si triste, la nuit, elle était maintenant charmante avec ses deux rangées de très vieux tilleuls qui bruissaient doucement et le vent rabattait sur Durtal leur languissante odeur.

Assis sur un banc, il embrassait, d’un coup d’œil, la façade de l’abbaye.

Précédé d’un long potager où, çà et là, des rosiers s’épanouissaient au-dessus des vasques bleuâtres et des boules veinées des choux, cet ancien château, bâti dans le goût monumental du XVIIe siècle, s’étendait, solennel et immense, avec ses dix-huit fenêtres d’affilée et son fronton dans le tympan duquel était logée une puissante horloge.

Il était coiffé d’ardoises, surmonté d’un jeu de petites cloches et l’on y accédait par un perron de plusieurs marches. Il arborait une altitude d’au moins cinq étages, bien qu’il n’eût en réalité qu’un rez-de-chaussée et un premier, mais à en juger par l’élévation inattendue des fenêtres, les pièces devaient se plafonner à des hauteurs démesurées d’église ; somme toute, cet édifice était emphatique et froid, plus apte, puisqu’on l’avait converti en un couvent, à abriter des adeptes de Jansénius que des disciples de saint Bernard.

Le temps était tiède, ce matin-là ; le soleil se tamisait dans le crible remué des feuilles ; et le jour, ainsi bluté, se muait au contact du blanc, en rose. Durtal, qui s’apprêtait à lire son paroissien, vit les pages rosir