Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/31

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homme. Élevé au-dessus de l’humanité tout entière par la consécration, presque déifié par le sacerdoce, le prêtre pouvait, alors que la terre gémissait ou se taisait, s’avancer au bord de l’abîme et intercéder pour l’être que l’Église avait ondoyé, étant enfant, et qui l’avait sans doute oubliée depuis, et qui l’avait peut-être même persécutée jusqu’à sa mort.

Et l’Église ne défaillait point dans cette tâche. Devant cette boue de chairs, tassée dans une caisse, elle pensait à la voirie de l’âme et s’écriait : « Seigneur, des portes de l’enfer, arrachez-la » ; mais, à la fin de l’absoute, au moment où le cortège tournait le dos et s’acheminait vers la sacristie, elle semblait, elle aussi, inquiète. Recensant peut-être, en une seconde, les méfaits commis pendant son existence par ce cadavre, elle paraissait douter que ses suppliques fussent admises, et ce doute, que ses paroles n’avouaient point, passait dans l’intonation du dernier amen, murmuré à la Madeleine, par des voix d’enfants.

Timide et lointain, doux et plaintif, cet amen disait : nous avons fait ce que nous pouvions, mais… mais… Et, dans le funèbre silence que laissait ce départ du clergé quittant la nef, l’ignoble réalité demeurait seule de la coque vide, enlevée à bras d’hommes, jetée dans une voiture, ainsi que ces rebuts de boucherie qu’on emporte, le matin, pour les saponifier dans les fondoirs.

Quand on évoque, en face de ces douloureuses oraisons, de ces éloquentes absoutes, une messe de mariage, comme cela change ! continua Durtal. Là, l’Église est désarmée et sa liturgie musicale est quasi nulle. Il faut bien alors qu’elle joue les marches nuptiales des Mendels-