Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/65

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L’aspect était un peu rectiligne, mais la végétation était puissante, les prés frais et gras et partout des pampres escaladaient en un nonchalant fouillis des murailles aux arêtes couvertes de mousses vert émeraude et de lichens soufre.

L’allée réservée aux novices était à droite ; simplement façonnée par un berceau touffu de vignes, elle aboutissait à une grotte surmontée d’une médiocre statue de saint Joseph. Cette grotte se divisait en deux compartiments grillagés. L’on entretenait dans l’un des corbeaux, en souvenir de saint Benoît qui aimait à distribuer à l’un d’eux, devenu son servant, sa pâture ; dans l’autre, des colombes, en l’honneur de sainte Scholastique, dont l’âme s’envola, sous cet aspect, au ciel.

C’était une après-midi rousse et bleue, un de ces jours où le sourire d’un vieux printemps renaît sur les lèvres qui se fripent à peine du jeune automne. Le firmament voilé se déchirait tout à coup et criblait à travers les feuilles de vigne, le sol de larges gouttes de lumière et d’ombre. L’on semblait fouler aux pieds une nappe de dentelle noire couchée sur un fond de cailloux pâles. Les novices s’abritaient du soleil, en relevant, les uns, leurs capuchons, les autres, en ramenant sur leur tête, la partie dorsale du scapulaire. Ils riaient avec le père Emonot, leur sous-maître, le père zélateur, comme on le nomme.

Ce père Emonot, ancien vicaire d’une église de Lyon, était un petit homme nerveux, à la tête chauve et enfoncée, à la renverse dans le cou, au teint bilieux, aux yeux qui couraient pour qu’on ne les saisît pas, sous des lunettes.