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Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/102

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nance avec les femmes, n’avait point, lorsqu’il s’approchait, cette haleine de cassis échauffé que soufflent les autres, il était proprement rasé, sans taches ni trous à sa blouse, c’était, en fin de compte, un charmant garçon.

Auguste se rappelait, lui aussi, en satinant les feuilles avec la presse, les moindres incidents de la veille, les moments où sa jupe le frôlait, la danse de ses boucles d’oreilles alors qu’elle se mettait à rire, son joli mouvement de cou qu’il suivait des yeux, jusqu’à ce qu’il s’éteignît dans le corsage. Jamais il ne trouverait mieux que Désirée, seulement il comprenait qu’il n’y avait pas à tenter avec elle des risettes non contrôlées par un maire. Il était donc alors amoureux sans chances de réussite, à moins qu’il ne gagnât assez pour faire chauffer la potbouille et mettre des enfants au jour ! Mais, lui aussi, raisonnait en pure perte. Désirée lui semblait ravissante et le séduisait plus que toutes. Il n’y avait pas à dire : je ne veux pas, il faut se faire une raison, mon bonhomme, c’est bête. — Il était attaché aux cotillons de cette fille. — Le voulût-il, ne le voulût-il point, il fallait bien l’accompagner où qu’elle allât.

Il finit, comme tous les gens indécis, par s’écrier : — Ah ! Baste ! tant pis ! advienne que pourra ! et enfilant son paletot, il suivit la foule