Page:Huysmans - Sainte Lydwine de Schiedam (1912).djvu/224

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insolvables ; acquittez-vous donc, tandis que vous le pouvez et ne rechignez pas à endurer cette douleur qui est seule apte à refréner vos instincts de luxure, à briser votre orgueil, à amollir la dureté de vos cœurs. Le proverbe « le bonheur rend égoïste » n’est que trop vrai ; vous ne commencez à éprouver de la compassion pour les autres que lorsque vous en avez, pour vous-même, besoin ; le bien-être et la vigueur vous stérilisent ; vous ne produisez des actes vaguement propres que lorsque vous êtes éclopés ou réduits à l’indigence.

Et elle eût pu ajouter, avec l’une de ses futures héritières, la sœur Emmerich : « je vois toujours dans chaque maladie un dessein particulier de Dieu, ou le signe d’une faute personnelle ou d’une faute étrangère que le malade, qu’il le sache ou non, est obligé d’expier — ou bien encore une épreuve, c’est-à-dire un capital que le Christ lui assigne et qu’il doit faire valoir par la patience et la résignation à sa volonté sainte. »

Mais combien, parmi ces visiteurs, qu’il fallait convaincre que le Seigneur n’agit pas autrement qu’un chirurgien qui ampute les parties gangrenées et qui torture celui qu’il opère pour le sauver ! combien ne se rebellaient et ne s’épandaient point en des serments d’ivrognes, promettant d’être sages, s’ils étaient guéris ! combien n’en revenaient pas à leur question oiseuse, à leur enquête obstinée : pourquoi moi et pas tant d’autres qui sont plus coupables ?

Et elle devait encore leur expliquer que, d’abord,