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TRIBUS ARABES.

mais à Dieu ne plaise qu’une telle calomnie soit dite de la sœur d’Er-Rechîd, et que l’on attribue à de puissants Arabes de la tribu de Taï une origine si vile, en les faisant descendre d’une race étrangère, d’une famille d’affranchis tels que les Barmekides[1]. D’ailleurs, il est impossible, par la nature même des choses, qu’une personne descendue de Barmek ait pu exercer l’autorité suprême dans une tribu à laquelle elle n’appartenait pas par la naissance. Nous avons déjà fait une observation semblable dans les prolégomènes de cet ouvrage[2].

La famille de Mohenna obtint le commandement des Arabes à-peu-près vers l’époque où s’établit la puissance des Aïoubides. Eimad-ed-Dîn-el-Ispahani dit, dans son ouvrage intitulé El-Barc-es-Chami[3] : « El-Adel[4] s’arrêta au Merdj, près de Damas, accompagné d’Eiça, fils de Mohammed, fils de Rebiâ, chef des Arabes du Désert, qui s’était fait suivre d’un grand nombre de son peuple. Auparavant, lors de la souveraineté des Fatemides, le droit de commander à ces Arabes appartenait à la famille Djerrah, de la tribu de Taï. Ils avaient alors pour chef Moferredj-Ibn-Daghfel-Ibn-Djerrah, auquel la ville de Ramla avait été concédée en fief. Ce fut lui qui arrêta Iftîkîn, client de la famille des Bouides, qui s’était enfui de l’Irac avec son patron Bakhtyar[5], en l’an 364 (974-5 de J.-C.). Iftîkîn avait envahi la Syrie et s’était emparé de Damas. Il marcha ensuite avec les Carmats et livra bataille à El-Azîz, fils d’El-Moëzz-li-Dîn-Illah, et souverain de l’Egypte ; mais son

  1. Comparez la Chrestomathie de M. de Sacy, tome i, p. 372.
  2. Cette observation n’est pas d’une justesse absolue. Dans le cours de cet ouvrage on trouvera plus d’un exemple d’une personne parvenue au commandement d’une tribu à laquelle elle n’appartenait pas.
  3. Eimad-ed-Dîn fut un des secrétaires du sultan Saladin (Salâh-ed-Dîn), dont il a écrit la biographie. Cet ouvrage a été publié par Schultens. Le Barc-es-Chami formait sept gros volumes et renfermait l’histoire des guerres de Saladin en Syrie.
  4. El-Adel, ou plutôt El-Mélek-el-Adel-Saif-ed-Dîn, frère de Saladin, gouverna successivement plusieurs provinces au nom de ce sultan.
  5. Voy. Abulfedœ annales, an 364.