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TRIBUS ARABES.

cun de ces lieux forme un séjour à part et possède de nombreux bourgs, des dattiers et des eaux courantes. La population de ces localités se composait principalement de Zenata, et dans chacune d’elles l’on se disputait le commandement par l’intrigue et par les armes. En poussant vers ce côté leurs expéditions nomades, les Makil y établirent leur autorité et imposèrent aux habitants un tribut et des contributions dont ils se firent un revenu et un moyen d’agrandir leur puissance.

Pendant fort longtemps, les Makil payaient au gouvernement zenatien un impôt à titre de dîme ; ils lui remettaient aussi le prix de sang [quand ils avaient tué un sujet de l’empire], et ils avaient même à supporter une taxe appelée port de bagage[1] dont le sultan réglait le montant à son gré.

Jamais ces Arabes ne commirent des brigandages sur les limites du Maghreb ni sur les plateaux ; jamais ils n’interceptèrent les caravanes qui se rendaient en Soudan de Sidjilmessa et d’autres lieux : le gouvernement du Maghreb, sous les Almohades, et, ensuite, sous les Zenata, était non-seulement assez fort pour les châtier, mais il avait soin de tenir fermés les défilés qui mènent dans le Tell et de préposer de forts corps de troupes à la défense des frontières. En récompense de leur conduite paisible, les Makil obtinrent quelques concessions ; mais ces ictâ[2] étaient considérés moins comme un droit que comme une faveur.

On trouve parmi eux plusieurs familles appartenant aux tribus de Soleim et de Saîd, fractions de la grande tribu des Rîah. On y rencontre aussi quelques Amour, descendants d’El-Athbedj ; mais tous ces étrangers y sont en petit nombre, comme nous l’avons déjà dit. Il en est autrement à l’égard des tribus

  1. C’est-à-dire : droit de transit. — Ils payaient cette taxe en revenant du Tell avec leurs provisions de blé.
  2. Ictâ, mot dérivé de la racine catâ (couper), désigne la concession, faite par le sultan, d’une de ses sources de revenu à un sujet, moyennant une redevance annuelle. Une terre, une ville, les impôts d’une localité, les pâturages d’un territoire, etc., peuvent être concédés en ictâ. Ces apanages doivent être accordés pour un temps limité ; mais elles finissent généralement par rester en la possession de l’usufruitier et par devenir héréditaires.