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��PROLEGOMENES

��la puissance perceptive des favoris de Dieu [ouéli), de ces gens à qui Dieu a donné la science infuse' et les connaissances divines. Les personnes prédestinées au bonheur éternel jouissent de cette percep- tion tant qu'elles restent dans les limbes^.

Les âmes de la troisième classe sont créées avec la faculté de pou- voir se dégager tout à fait de la nature humaine, de sa corporéité et de sa spiritualité, afin de s'élever jusqu'à la nature angélique de la sphère supérieure, où elles deviennent effectivement anges, mais seulement pendant un clin d'œil. En ce moment, elles aperçoivent la Compagnie sublime (les anges) dans la sphère qui les renferme, et elles entendent, pendant ce court instant, les paroles de l'âme (univer- P. 178. selle) ^ et la voix de la divinité. Telles sont les âmes des prophètes, auxquels Dieu a départi la faculté de se délivrer de la nature hupaine pendant un instant de temps. C'est dans cet état qu'ils reçoivent la révélation. Dieu les ayant créés avec un naturel qui les y prédispose. Afin qu'ils puissent se dégager des obstacles et des empêchements dont le corps les entoure, tant qu'ils restent dans la condition hu- maine, Dieu a établi dans leur nature une pureté de mœurs, un sentiment de droiture qui les porte vers la spiritualité; il a im- planté dans leur caractère un esprit de piété qui les retient toujours dans cette voie et les conduit au but de leurs désirs. Par ce genre d'affranchissement (qui délivre l'âme des influences du corps), ces hommes se dirigent à volonté vers le monde spirituel, faveur qu'ils doivent, non pas à leurs mérites acquis ni à des moyens artificiels, mais au caractère inné qu'ils tiennent de leur créateur. En se dé-

��' L'adjectif j)i>.> est formé de l'adverbe yoJ, de l'expression *»[ qjJ ^j./» a d'au- près de Dieu. • Dans le langage des mys- tiques, il désigne les grâces qui viennent de Dieu, ses faveurs spontanées. (Voy. No- tices et extraits, l. XII, p. ao3.)

  • Le mot berzekh signifie ce qui sépare

deux choses, comme le temps qui s'écoule entre la mort et la résurrection , comme le

��tombeau qui est situé entre ce monde et l'autre. Il désigne aussi une région dans l'espace, car les musulmans disent d'un mort qu'il est entré dans le berzekh. Il signifie, de plus, une barrière. On lit dans le Coran (sour. iv, vers, ao) : «11 a séparé les deux mers qui allaient se lou- cher ; entre elles est'unebarrière (berzekh ) . » ^ Voy. ci-devant, p. 198, note i.

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