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266 PROLÉGOMÈNES

à celui dont les hommes policés sont capables. Les gens qui, depuis leur première jeunesse, ont vécu sous le contrôle d'une autorité qui cherche à former leurs mœurs et à leur enseigner les arts, les sciences et les pratiques de la religion, un tel peuple perd beaucoup de son énergie et n'essaye presque jamais de résister à l'oppression. Voyez, par exemple, les jeunes gens qui étudient le texte du Coran et qui , voulant assister aux leçons données par d'habiles maîtres, de savants profes- seurs, fréquentent des assemblées où tout inspire le recueillement et le respect. Le lecteur qui aura bien compris la portée de nos obser- vations, c'est-à-dire, que le contrôle d'une autorité supérieure affai- blit l'énergie des peuples, se gardera bien d'en nier la justesse; il ne leur opposera pas l'exemple offert par les Compagnons du Prophète, qui , tout en se conformant aux prescriptions de la religion et de la loi, conservaient toujours leur force d'âme et surpassaient en bra- voure tous les autres hommes. (Il ne pourra pas se prévaloir de cet argument,) car le législateur, lorsqu'il communiqua la vraie religion aux musulmans, n'eut pour les contrôler que l'influence de leurs propres cœurs, sur lesquels les promesses elles menaces renfermées dans le Coran avaient fait une vive impression. Leur soumission n'était pas le résultat d'un enseignement systématique, d'une instruction scientifique; elle provenait de l'influence de la religion et des pré- ceptes oraux qu'ils avaient pu recueillir. Ils s'y conformèrent avec em- pressement, parce que la foi et la croyance aux dogmes de la religion avaient jeté dans leurs cœurs des racines profondes. Leur énergie de caractère demeura intacte, n'ayant jamais souffert les atteintes qu'une éducation régulière et l'autorité d'un gouvernement établi auraient pu P. a32. lui porter. Le khalife Omar disait : « Celui que la loi divine n'a pas corrigé, Dieu ne' le corrigera pas. » Il désirait que chacun eût pour moniteur son propre cœur, étant convaincu que le législateur savait mieux que personne ce qui convenait au bonheur des hommes. L'affaiblissement progressif du sentiment religieux ayant rendu né- cessaires des moyens coërcilifs, la connaissance de la loi devint une ' Pour -ïj , User. ^.

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