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ROSMERSHOLM

kroll. Et vous aussi, je crois.

rébecca. — Oui ; elles enivrent si délicieusement. Autrefois nous devions nous refuser ce plaisir.

kroll, hochant tristement la tête. — La pauvre Félicie ne supportait pas le parfum des fleurs.

rébecca. — Ni leur éclat. Elle en était toute troublée.

kroll. — Je m’en souviens bien. (Changeant de ton.) Eh bien ! comment va-t-on ici ?

rébecca. — Oh ! tout va son train calme et régulier. Les jours se suivent et se ressemblent. Et chez vous ? Votre femme ?…

kroll. — Chère mademoiselle West, ne parlons pas de moi et des miens. Dans chaque famille il y a quelque chose qui cloche. Surtout à l’époque où nous vivons.

rébecca, après un moment de silence, s’asseyant dans un fauteuil. Pourquoi n’êtes-vous pas venu nous voir une seule fois pendant les vacances ?

kroll. — Je n’aime pas à forcer les portes…

rébecca. — Si vous saviez comme vous nous avez manqué…

kroll. — Et puis, j’ai été en voyage…

rébecca. — Oui, pendant deux semaines. Vous avez assisté à des réunions publiques, paraît-il ?

kroll, faisant un signe d’assentiment. — Oui ; qu’en dites-vous ? Auriez-vous pensé qu’en vieillissant je tournerais à l’agitateur politique. Dites ?