Page:Ibsen - Une maison de poupée, trad. Albert Savine, 1906.djvu/73

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pour conserver mon pauvre emploi comme s’il s’agissait d’une question de vie ou de mort.

Nora.

Cela en a tout l’air.

Krogstad.

Ce n’est pas seulement à cause des appointements ; ce n’est pas là le plus important : Il y a autre chose… Je vais tout vous dire. Vous savez naturellement, comme tout le monde, que j’ai commis une imprudence, voici bon nombre d’années.

Nora.

Je crois en avoir entendu parler.

Krogstad.

L’affaire n’est pas allée jusqu’aux Tribunaux, mais sur le moment tous les chemins me furent fermés, c’est alors que j’entrepris le genre d’affaires que vous savez. Il fallait bien que je cherchasse à m’occuper. Et j’ose dire que je n’ai pas été pire que les autres. Maintenant je veux sortir de là. Mes fils grandissent. Pour eux il faut que je reconquière le plus de considérations possible. La porte de la banque était pour moi le premier échelon, et voici maintenant que votre mari m’en a précipité pour m’enfoncer de nouveau dans la boue.

Nora.

Mais, mon Dieu, monsieur Krogstad, il n’est pas en mon pouvoir de vous aider.

Krogstad.

Ce qui vous manque, c’est la volonté de le faire, mais j’ai des moyens de vous y obliger.

Nora.

Vous n’irez pas dire à mon mari que je vous dois de l’argent.

Krogstad.

Hum ! Et si je le faisais ?