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LETTRE I

Elle m’attirait plus que sa sœur et pour elle j’eusse bravé des périls autrement précis que les regards meurtriers dont me perçaient deux ou trois pallikares civils et militaires. Les faveurs dont j’étais l’objet incendiaient d’une sombre rage le visage du pandore, mon introducteur. J’étais ravi.

Peu à peu, je façonnai avec patience ma trop séduisante élève et je la conduisis sur les terrains de mon choix, en de longues et troublantes conversations.

Vous m’écrivez très justement que la flagellation, si fréquente dans les pays du Nord, est rarement pratiquée chez les peuples méridionaux. Notez pourtant que, dans l’antiquité, les verges jouaient un grand rôle, à l’école, au tribunal, dans les ergastules. Enfin, le culte de Diane, à Sparte, se pimentait de flagellations publiques fort goûtées et fort suivies.

Ce rite fut l’objet de plusieurs entretiens avec Chary, car elle était instruite et fort intelligente. Hérodote et Thucydide me pardonneront d’en avoir modifié le protocole pour les besoins de la cause. Des anciens on passe facilement aux modernes et c’est un jeu que de falsifier un peu, très peu même si je vous entends bien, les méthodes disciplinaires en honneur dans certains pensionnats. Qui veut la fin veut les moyens. Chary prenait plaisir à ces conversations. Elle se familiarisait avec la chose, avec l’idée. Ses yeux luisaient, de furtives rougeurs empourpraient son visage. Elle provoquait des confidences, le regard perdu sur la mer violette, la main crispée dans ma main, la croupe cabrée sous de brèves caresses, anodines privautés dont je n’abusais