Page:Irving - Le Livre d’esquisses, traduction Lefebvre, 1862.djvu/119

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voisinage, qu’elle avait doucement rendu le dernier soupir, et était allée rejoindre ceux qu’elle avait aimés, dans le monde où l’on ne connaît pas le chagrin, où les amis ne sont jamais séparés.


UN DIMANCHE, À LONDRES.


Dans le précédent article j’ai parlé d’un dimanche à la campagne en Angleterre, et de ses effets adoucissants sur le paysage. Mais où sa sainte influence se manifeste-t-elle d’une façon plus énergique qu’au cœur même de cette grande Babel, Londres ? En ce saint jour le monstre-colosse s’arrête charmé. L’intolérable brouhaha, la fièvre de la semaine sont expirés. Les boutiques sont fermées, les feux de forges et de manufactures sont éteints, et le soleil, que n’obscurcissent plus d’épais nuages de fumée, verse à flots de sobres et jaunes rayons dans les rues silencieuses. Les rares piétons que vous rencontrez, au lieu de marcher à pas pressés, avec des figures inquiètes, s’avancent tranquillement ; de leurs fronts reposés ont disparu les rides creusées par les affaires et les soucis ; ils ont revêtu leurs mines des dimanches, leurs manières des dimanches, en même temps que leurs habits des dimanches, et leur esprit s’est débarbouillé aussi bien que leur personne.

Et maintenant le bruit mélodieux des cloches, parti des tourelles des églises, appelle au bercail les ouailles qui leur sont propres. Vous voyez l’honnête famille du marchand déboucher de la maison, petits enfants en tête ; ou c’est le bourgeois et son avenante compagne, suivis des filles aînées, aux petits livres de prières reliés en maroquin et serrés dans les plis de leurs mouchoirs de poche. La fille de service les suit des yeux à la fenêtre, admirant les toilettes de la famille, et recevant parfois un signe