Page:Irving - Le Livre d’esquisses, traduction Lefebvre, 1862.djvu/83

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ils viennent, sans arrière-pensée d’apologie. Mais comme ils sont choisis, disposés, gradués pour atténuer l’effet de ce mariage imprévu et regrettable ! C’est à peine un mariage, c’est une protection, c’est une agonie, c’est une mort, car la mort est le dernier trait du tableau ; on y arrête avec soin notre regard, comme sur une sorte de réparation qui doit prévenir tout reproche. Les hommes, plus coulants, parce qu’ils sont moins délicats, pardonneront peut-être à Sarah Curran son mariage, tout en regrettant, comme artistes, qu’il gâte la perfection qu’elle leur avait fait rêver ; mais les femmes, je le crains, plus sévères que nous sur les choses du cœur, ne le pardonneront pas.


L’ART DE FAIRE DES LIVRES.


Si la rigoureuse sentence de Synésius est juste : — « Mieux vaudrait dérober à un mort ses vêtements que le fruit de ses travaux », — qu’adviendra-t-il de la plupart des écrivains ?
Burton, Anatomie de la mélancolie.


Je me suis souvent étonné de l’extrême fécondité de la presse, comment il pouvait se faire que tant de têtes sur lesquelles la nature semblait avoir laissé tomber la malédiction de la stérilité accouchassent néanmoins d’énormes in-folio ; mais à mesure que l’homme avance dans ce voyage de la vie, les sujets d’émerveillement diminuent de plus en plus pour lui, et continuellement il découvre quelque cause bien simple à ce qui lui paraissait tenir du prodige. C’est ainsi qu’il m’est arrivé, dans mes pérégrinations au milieu de cette grande métropole, de tomber en étourdi sur une scène qui me dévoila quelques-uns des mystères de l’industrie ayant pour objet la fabrication des livres, et mit enfin un terme à mon étonnement.