Page:Ivoi - Femmes et gosses héroïques.djvu/266

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Et sans hausser le ton, avec cette placidité étonnante des Belges, elle continue :

— Je domiciliais à Charleroi. Ils sont venus prendre le père pour le fusiller. Je le cramponnais avec toute ma force afin de le retenir. L’officier, il avait son sabre ; il a profité avec pour couper mes mains.

Pour un sac de thunes, je n’aurais pas pu parler. Ma langue séchée, me faisait l’effet d’un petit copeau.

Elle eut un grand geste entourant le portrait du généralissime d’une filiale caresse :

— C’est en pensant à lui que j’ai supporté d’être infirme. Le courage qu’il avait me faisait un cœur aussi garni. Pendant la retraite de Charleroi, Bapaume, Compiègne, Senlis, Meaux, il me semblait que je l’entendais se parler soi-même :

— Je dois triompher la France, compléter la préparation, l’armement des troupes, en dessous des balles. Est-ce que je ne vais pas être un trop petit homme ?

Ah ! ça était douloureux, cette pensée-là. Mais vint la bataille de la Marne, et alors je