Page:Ivoi - Jud Allan, roi des gamins.djvu/262

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— D’accord, seulement il vous faudra la ramener à Washington.

— Erreur, c’est vous qui allez la joindre immédiatement à Agua Frida.

— Mais M. de Chazelet ?

— Il vous accompagnera.

— Quel prétexte pourra ?…

— … Le voyage. Il n’est point besoin de prétexte. Le Français a une raison qui le conduira à vous supplier de partir.

— Une raison ?

— Le désir de retrouver sa fiancée, mon bon sénateur. Ah ! vous êtes heureux de m’avoir pour alliée, car vous me semblez ignorer tout ce que l’on peut tirer du sentiment.

On eût cru que les regards de Rouge-Fleur se voilaient à ces dernières paroles. Mais bien vite les yeux redevinrent clairs, une ironie plus vive s’y marqua.

— Vous ferez parvenir cette missive au marquis, reprit-elle en présentant au milliardaire un coquet billet.

— Qu’est cela ?

— Une lettre de miss Linérès.

— De Linérès, répéta Jemkins au comble de la surprise. Vous avez réussi à lui faire écrire ?…

— Lisez, curieux sénateur, lisez et vous serez persuadé.

Frey déplia le papier. Les lignes suivantes lui apparurent :

« Si je vous suis chère comme mon cœur le croit, une simple affirmation de moi suffira. Rejoignez-moi à Agua Frida, dans la propriété que je vais tenir de l’héritage de mon père. Il ne m’est pas permis de m’expliquer davantage ; mais le vous jure que là-bas, notre union, notre bonheur ne subiront aucun retard. Partez de suite. Celle qui ne vit que pour devenir votre

« Linérès. »

— Oh ! grommela Frey ! Il n’y a pas de doute. Avec un pareil miroir, l’alouette est prise. Mais comment la jeune fille ?…

— Comment ? ne vous inquiétez pas de cela. Elle a écrit ; vous reconnaissez que le marquis ne résistera pas ; voilà l’important.

— Sans doute ! Sans doute ! Seulement… ai-je le droit de critique, charmante lady ?