Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/210

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— Songez-y et obéissez, sans chercher à comprendre.

Dominée, la jeune femme se pencha à la fenêtre, redisant les paroles que le pseudo-douanier murmurait près du pavillon rose et délicat de sen oreille :

— Oui, moi. Seulement, feignez de l’ignorer jusqu’à Djokjokarta. Ne m’approchez pas. Si vous m’abordiez d’ici là, vous me tueriez.

— Quoi ?

— Cela est ainsi. Demain, je prends le train de cinq heures vingt-cinq pour Samarang. Partez par le train suivant pour éviter toute chance de rencontre.

— Vos désirs sont des ordres, mademoiselle ; mais je vous reverrai à Djokjokarta ?

— Soyez-en certain.

Il y eut un silence. L’entretien semblait terminé. Pourtant. Albin ne faisait pas mine de s’éloigner.

Il s’était adossé au pilier de bois et la tête penchée, il avait l’air de réfléchir.

Soudain, il releva le front.

— Pardonnez-moi. Je me perds en plein mystère. Comment, vous, Américaine, êtes-vous la troisième fiancée ? Comment se fait-il que je doive vous épouser, vous à qui je rêvais sans vous connaître ?

Il pouvait questionner longtemps ainsi.

Eléna ne lui expliquerait certainement pas la situation. En dépit de son effort cérébral, elle s’embrouillait de plus en plus dans l’incompréhensible.

Chaque mot rendait plus épais le brouillard dont son cerveau s’obscurcissait. Voilà qu’elle était la troisième fiancée d’elle ne savait qui, et qu’il y avait, sans que rien l’en eût avertie, des projets de mariage entre elle et ce gentleman qu’elle entendait pour la première fois.

Ses mains fines se crispèrent sur son front en signe de détresse.

Cependant Albin reprit :

— Mais je vous parle, j’interroge, et cela sans avoir été présenté. Pardonnez-moi, je vais combler cette lacune… Mon esprit est à l’envers depuis ce jour où, sur le port, je vous vis auprès de ce vieillard que vous appeliez votre père.