Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/250

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dialogue diminuait. Les répliques s’espaçaient progressivement. On eût cru que Fleck, Niclauss cherchaient leurs mots.

Ce fut bientôt si sensible que la jeune fille s’en étonna.

Furtivement, elle examina son père, son fiancé.

Tous deux se renversaient de plus en plus sur leurs sièges, leurs paupières papillotaient ; avec peine ils semblaient étouffer des bâillements.

Le Strehom-labou rouge, fiché a la boutonnière des deux hommes, accomplissait son œuvre soporifique.

Lisbeth ne pouvait deviner cela. Aussi son étonnement s’accrut quand elle vit les Allemands fermer les yeux, renverser leurs têtes sur les dossiers de leurs fauteuils et prendre l’apparence indiscutable de gens profondément endormis.

Sa surprise devint de la stupéfaction lorsqu’Albin se leva et chatouilla le nez des dormeurs, sans que ceux-ci fissent un mouvement.

Enfin, elle connut les joies de l’ahurissement, car Morlaix, se tournant vers elle, lui dit, avec le plus aimable sourire :

— Mademoiselle Lisbeth, nous avons à causer sans témoins ; les témoins dorment, nous écoutons notre gentille alliée.

— Mais ils vont se réveiller, réussit-elle à prononcer.

— Non.

Du doigt, le brave garçon désigna les fleurs rouges :

— Le Strehom-labou écarlate est un somnifère puissant. Vous serez obligée de faire porter ces messieurs dans leurs chambres.

— Quoi, ils ne pourront pas…

— Pas avant plusieurs heures.

Tout en parlant, Morlaix enlevait aux dormeurs les corolles sournoises et les jetait au dehors.

— Il ne faut pas risquer de les rendre malades.

Quant à Lisbeth elle joignit les mains :

— Ah ! vous vaincrez puisque les fleurs combattent pour vous.

Puis vivement :

— Mais ne perdons pas une seconde. Depuis notre séparation, j’ai appris des choses graves qu’il est nécessaire que vous sachiez.