Page:Jacobus X - L'amour aux Colonies, 1893.djvu/244

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més viennent prêter leur concours à cette solennité. L’orchestre se compose de huit balafours, cinq koras, une vingtaine de guitares, des flûtes, des tambourins et des tam-tams, en un mot, tout ce qu’on a pu rassembler de musiciens et d’instruments ; il y a également des chœurs de femmes et de jeunes filles.

« Les fréquentes libations de dolo (bière de mil), faites depuis le matin, ne sont pas étrangères à l’ardeur musicale et chorégraphique que chacun déploie déjà en attendant le commencement de la solennité. Le prix du gouro a doublé, et ce précieux aphrodisiaque commence à manquer sur le marché, tellement les habitants du village en ont fait de grandes provisions. Vers trois heures de l’après-midi, nous voyons se diriger du côté du Fort une foule nombreuse. Ce sont les jeunes héros de la fête qui, accompagnés des Griots, viennent en grande pompe saluer le Commandant et tâcher d’obtenir de lui quelques générosités. Les futurs circoncis sont au nombre d’une trentaine, de douze à quatorze ans. Ils sont en grand boubou de fête, couverts des bijoux et des amulettes de leurs familles respectives. Leur figure est rayonnante : tout ce que l’on chante autour d’eux pour les encourager à supporter vaillamment la brutale opération, les grise et les excite.

» D’une voix criarde et éraillée qu’il fait sortir de la gorge, le chef des Griots leur dit : « Demain vous serez purs, demain vous serez des hommes. Vous pourrez faire la guerre. Les cavaliers de Samory fuiront devant vous. » Les femmes et les jeunes filles reprennent en chœur presque textuellement les mêmes paroles : puis les Griots continuent tous ensemble : « Un Malinké n’a pas peur de laisser couler son sang. » Les jeunes filles : « Les fils de Malinké n’ont pas peur du couteau. » Les Griots : Demain toutes les femmes seront contentes de vous. »