Page:Jacobus X - L'amour aux Colonies, 1893.djvu/54

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bracelet de jambe en argent et une bague en or. Coût : de cent vingt à cent trente piastres. C’est donc, au bas mot, une somme de cent cinquante piastres d’achats, et, avec la dot et les dépenses de la noce, on atteint vite le chiffre de deux cents piastres, soit mille francs. Or, on fait toutes ces dépenses pour ne posséder qu’une pseudo-pucelle, et une sorte de petite niaise qui n’est bonne qu’à manger, boire et dormir, en attendant qu’elle se laisse voler et dépouiller de tout, la première fois qu’elle ira au baquan.

Les gens bien avisés préfèrent prendre la succession d’un ami ou collègue qui quitte la colonie. Ils ont ainsi une femme dressée, nippée et comprenant un peu le Français. Mais, que vous la preniez novice ou formée, vous n’avez jamais qu’une épouse dont la fidélité est en rapport avec sa moralité. Elle feindra la vertu vis-à-vis de vos amis et connaissances Européens. Elle viendra même faire, auprès de vous, étalage des refus qu’elle a fait essuyer à ceux qui ont tenté de la séduire. Mais elle se dédommage amplement avec les Annamites malins, toujours prêts à rire aux dépens du Pha-lan-za. Un beau jour, le fonctionnaire ou l’officier qui croit posséder une perle de vertu, et qui n’est pas au courant de la conduite de sa maîtresse, recueille les fruits amers des complaisances qu’elle a pour les autres.

Le boy garde du corps. — Le seul moyen, pour un Européen, d’empêcher sa maîtresse Annamite de courir avec le premier galant venu, consiste à lui donner comme garde du corps son propre boy Annamite. Celui-ci joue le rôle du chien du jardinier et fait bonne sentinelle ; mais, mieux avisé que le chien, il prend sa part, ce qui forme un ménage à trois.

J’avoue que ce moyen manque de moralité, mais c’est le seul qui donne quelque sécurité au point de vue des