Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/40

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intéresser à une femme ; moi, j’en sais mille très innocentes ! Eh ! je vous prie, n’est-ce pas déjà un ineffable bonheur, l’avoir surprise dans sa terreur si animée, avoir entendu son petit cri d’oiseau, moitié effrayé, moitié joyeux ? Et comme elle courait, et s’arrêtait ; comme elle était bien assise sur le gazon, et comme elle s’est relevée d’un seul bond ! Et comme elle appelait : Charlot ! Charlot ! Et d’ailleurs, ne suis-je pas monté sur son âne ? Ne me suis-je pas assis à la même place qu’elle ? Elle ne m’a pas vu, mais qu’importe ? j’ai couvert ma tête de son chapeau de paille, j’ai passé sous mon menton le ruban qui avait touché le sien ; j’ai été penché sur elle quand elle embrassait Charlot, et ce tendre baiser, c’est presque moi qui l’ai reçu ! Ainsi pensant et méditant, je regagnai le bienveillant cabaret du Bon Lapin, tout entier à mon bonheur de la matinée.

J’aime le cabaret du Bon Lapin. Vous le trouverez, comme je vous le disais, au bas de la montagne de Vanves, adossé à un moulin et hospitalièrement situé entre une cour et un jardin ; la cour est ombragée d’arbres, et protégée, quand il fait chaud, par une tente épaisse sous laquelle s’abritent les dîneurs ; cette cour est d’ordinaire la salle à manger des commères de Paris,