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SPÉCULATIONS

dessus à la cloison du barrage et restent séparés. Un bief est une caste.

Il est peu honorifique pour l’espèce humaine que, la pêche du noyé rapportant (sauf en Seine-et-Oise et en Seine-et-Marne) vingt-cinq francs par individu entier et en bon état — car on les vend à la pièce et non à la livre — il est peu honorifique que la pêche de l’être humain vivant ne soit rémunérée que par quinze francs. Il y a là une bien compréhensible tentation pour le plus honnête homme de s’inspirer de la fable : « Petit poisson deviendra grand… » et de rejeter, comme fretin, à l’eau l’être humain vivant jusqu’à ce que sa valeur ait grossi. Le temps est finance, et, en ce cas particulier, de fort exactement dix francs.

Le noyé expérimenté, entendons : avancé en âge, élude cependant la patience et la ruse du sauveteur. La loi autorise comme engin de pêche une corde passée sous les membres antérieurs de l’animal. Or le noyé adulte se défend selon le terme technique, par autotomie : il coupe lui-même sur le fil le membre saisi, à l’exemple de la patte du crabe et de la queue du lézard.

Enfin, et ceci suffirait à prouver s’il était encore nécessaire, qu’il s’agit bien d’un animal aquatique et non point d’un homme décédé par immersion : en aucun cas le noyé ne reçoit la sépulture, réservée au seul être humain sec.