Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/149

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dront ; ils recevront leurs plaintes ; ils les éclaireront ; ils s’informeront de leurs besoins. Ils leur diront avec quelle sollicitude la Convention s’occupe de tout ce qui concerne l’armée…

« Ils entretiendront les soldats des travaux de la Convention nationale, des sources qu’elle ouvre à l’industrie, à la prospérité publique. Ils les entretiendront dans les principes de l’égalité, du républicanisme et de la discipline militaire…

« Ils donneront tous leurs soins aux hôpitaux, ils les visiteront ; ils iront consoler les honorables victimes de la liberté ; ils ne quitteront pas ces asiles sans avoir connu le régime, sans s’être assurés si le service se fait avec ce dévouement que l’humanité exige… Il est inutile d’observer que les lits, les matelas ne doivent plus manquer dans les hôpitaux, tant qu’il y en aura dans les maisons des citoyens. »

C’est par cet esprit d’humanité et de vaillance, de discipline et de liberté, communiqué sans cesse aux armées, que la Révolution réalisera, dans les institutions et dans les mœurs, les principes de la loi du 24 février. N’a-t-on pas, pour le dire en passant, reconnu dans la belle instruction dont j’ai cité quelques fragments, la manière noble et douce, grande et persuasive de Barère ? C’est le vivant commentaire moral de la loi d’organisation proposée en février par Dubois-Crancé. Dès le mois d’août 1793, cette loi sera entrée partout en application.

Mais, en février, il ne suffisait pas de régler l’organisation future de l’armée ; il fallait créer ou plutôt compléter cette armée. Une autre loi du même jour, 24, prescrivit la levée de 300,000 hommes. Ce n’était plus, comme sous la Législative et la Constituante, un simple appel à la volonté libre ; les volontaires, quel que fût l’élan du pays, n’auraient pas suffi à constituer les armées puissantes dont la patrie révolutionnaire avait besoin. Ce n’était pas non plus encore la conscription, l’universelle obligation du service militaire. Dubois-Crancé, Aubry, devançant un peu les nécessités prochaines, n’avaient pas craint d’émettre cette idée, effrayante d’abord pour la Révolution, que le service militaire était la première obligation légale de tous les citoyens.

La Convention s’arrêta à un système intermédiaire qui, à vrai dire, contenait en germe la conscription universelle. Le contingent de 300,000 hommes devait être réparti entre tous les départements au prorata de la population. Les directoires de département devaient répartir ensuite le contingent départemental entre les districts, et ceux-ci entre les communes. C’est donc finalement en chaque commune que devait se faire le recrutement. Il était tenu compte à chacune des volontaires déjà fournis par elle. Aussitôt que les officiers municipaux avaient reçu notification de l’état des hommes que leur commune devait fournir, ils devaient en donner connaissance aux citoyens qui étaient convoqués à cet effet. Pendant les trois premiers jours qui suivaient cette première notification, il était ouvert un registre sur lequel se faisaient