Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/248

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peindre les menées odieuses des Roland, des Brissot, des Gensonné, des Guadet, des Pétion, des Barbaroux, des Louvet. Oui, que de tous les Français libres, ces traîtres soient plus que démasqués, car ils ont la conviction intime de leur trahison ; ils pensent que la nouvelle proposition faite ces jours-ci par des patriotes d’établir un nouveau tribunal révolutionnaire, et celle de la destitution des ministres sont des palliatifs insuffisants, de fausses mesures, puisqu’elles n’atteignent qu’indirectement les assassins de l’intérieur qui trouvent un point de ralliement au cœur même de la Convention. Ils demandent comme mesure suprême, et seule efficace, que le département de Paris, partie intégrante du souverain, exerce en ce moment la souveraineté qui lui appartient ; qu’à cet effet, toutes les sections et cantons soient convoqués pour autoriser l’assemblée électorale du département de Paris à révoquer et rappeler les mandataires infidèles et indignes d’être les représentants de la République. »

Varlet lisait aux Cordeliers une adresse dans le même sens, et les Cordeliers affirmaient la trahison de Dumouriez et la nécessité d’en finir avec les traîtres. Chose curieuse, et qui montre bien que Jacques Roux continuait son action souterraine et profonde. Sans doute il voyait avec complaisance une agitation qui, en tendant tous les ressorts de la Révolution, préparait l’avènement des partis extrêmes, et il n’était pas fâché d’un mouvement qui, en débordant Robespierre et même Marat, les embarrassait. Mais, même au plus violent de la crise politique et nationale, il ne veut pas que le caractère économique des revendications populaires s’atténue. C’est le programme social qui doit être porté haut par les événements soulevés, et il faut que « le tonnerre » des lois contre les agioteurs et les monopoleurs domine tout le fracas de la bataille et tout le tumulte des partis. Jacques Roux laisse Varlet s’engager à fond dans la révolution politique. Mais lui, suscite sa section, la section des Gravilliers, pour que, le 9 mars, elle aille de nouveau à la Convention parler au nom de la misère :

« La section des Gravilliers n’a pas fait en vain le serment de défendre la République ; le sang même de nos frères d’armes, qui a rougi les plaines de Jemmapes, enflamme notre courage, en raison des dangers de la chose publique. Mais si la gloire nous appelle sur les frontières, notre devoir est d’assurer dans l’intérieur de la République la paix, la liberté et le bonheur. La nation ne vous a honorés de sa confiance que pour maintenir l’égalité par le règne des lois qui tournent à l’avantage non des gouvernants, mais des gouvernés ; non des riches, mais de la classe laborieuse et vertueuse de la société ; des lois enfin qui soient fondées sur les principes de la raison et de la justice éternelle.

« Depuis quatre ans que nous sommes en révolution, il faut vous le dire avec courage, la liberté n’a été qu’un vain fantôme ! Les intrigants, les hypocrites et les fripons nous ont opprimés, à l’ombre de la loi qu’enfantèrent l’or-