Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/394

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seul qu’il avait la figure d’un honnête homme. Ils ont allégué que l’Assemblée avait arrêté auparavant que les commissaires de police ne seraient nommés qu’après que les cartes seraient changées, et qu’ici la nomination est l’effet d’une cabale.

« Il est étonnant combien la loi mise à exécution a d’empire sur le peuple. Si la Convention laisse substituer à son autorité celle des comités de surveillance, elle est perdue, et je ne lui en donne pas pour huit jours. »

Je laisse, bien entendu, la responsabilité de sa philosophie feuillantine à l’observateur Dutard, qui ne cesse de répéter que Lafayette était son dieu. Mais ses notes nous permettent de voir en action les comités de surveillance. Un de leurs premiers actes fut de déclarer que les cartes d’identité de chaque citoyen devaient être établies de nouveau pour que la sincérité des opérations électorales fût entière ; et on devine combien d’occasions s’offrirent à eux, dans cette réfection des cartes, pour inquiéter, décourager et détourner des sections les citoyens hostiles à la Montagne et à la Commune.

Dans presque toutes les sections, les commissaires de police, soit qu’ils aient été élus avant que les forces bourgeoises se portent dans les sections, soit qu’ils aient été choisis sous l’influence des comités révolutionnaires, marchaient d’accord avec ceux-ci : c’était encore une grande force pour la Révolution nouvelle qui se préparait.

Mais c’est surtout leur union avec les autorités constituées du département et de la Commune qui donnait aux comités une grande puissance, c’était un faisceau presque indestructible des forces révolutionnaires se complétant les unes les autres. Le procureur de la Commune, Chaumette, comme s’il eût voulu racheter la modération forcée dont il fit preuve le 25 février et le 10 mars, se répandait en motions véhémentes, en réquisitoires ardents. Il semble agité par une sorte de fièvre patriotique et révolutionnaire.

Le 28 avril, la section des Droits de l’Homme, celle qui avait été compromise devant la Convention par le drapeau fleurdelysé qu’elle y avait porté par mégarde, tient à prouver la pureté de son zèle révolutionnaire :

« Le commandant de la section armée des Droits de l’Homme fait part du désir qu’ont les citoyens de cette section de présenter au Conseil général le drapeau qu’ils ont substitué à celui qui offusquait les regards des républicains, étant souillé des signes du royalisme. Le Conseil, ayant le maire à sa tête, descend sur la place de la Maison Commune, y faire l’inauguration du nouveau drapeau. Le Conseil remonte ensuite, accompagné de la force armée de ladite section qui défile dans la salle au son de la musique militaire et au milieu de nombreux applaudissements. »

C’était dissiper l’ombre qui pesait encore sur les récentes journées insurrectionnelles. C’était proclamer le civisme de ceux qui avaient porté d’audacieuses paroles à la Convention. De même, le 24 avril, le Conseil de la Com-