Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/419

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faire des couronnes qui seront distribuées aux vainqueurs de cette section à leur retour de Vendée. On nomme des commissaires pour presser, au Comité de salut public, la prompte délivrance des armes…

« L’administration de police rend compte de la situation de Paris, et soumet au Conseil des mesures liées à la tranquillité publique :

« Animées, disent les administrateurs, par l’enthousiasme de la liberté, de nombreuses cohortes républicaines vont se mettre en marche pour réduire les rebelles de la Vendée ; mais elles sont tourmentées par une inquiétude bien pardonnable. On ne peut se dissimuler que, dans ce moment, Paris renferme un nombre immense de gens suspects et vraisemblablement mal intentionnés ; les dissensions qui ont eu lieu dans différentes sections, les rassemblements effectués dans plusieurs endroits de la ville, l’audace avec laquelle se sont montrés les aristocrates, tout doit nous faire craindre qu’après le départ de nos braves frères, dont la présence n’a pas peu contribué à les contenir, ils ne troublent encore la tranquillité publique de Paris et ne parviennent, par leurs manœuvres perfides, à mettre la République dans les dangers les plus imminents.

« Nos frères qui partent et ceux qui ont déjà combattu laissent des familles peu fortunées ; il faut venir à leur secours ; le sybarite voluptueux, le riche égoïste doit surtout payer le repos dont il jouit et la défense de sa propriété. Il est donc instant de terminer le mode de répartition de l’impôt forcé. La Révolution, en nivelant les fortunes, prive nécessairement la classe intéressante des ouvriers, du travail qui les nourrissait. Le devoir des magistrats du peuple est de venir au secours des indigents. Nous croyons utile de chercher à établir à Paris une armée révolutionnaire soldée, composée seulement de patriotes peu fortunés, de véritables sans-culottes que l’impérieuse nécessité a pu seule retenir dans nos murs. Nous pensons qu’une mesure indispensable jusqu’à la fin des troubles qui désolent le département de la Vendée, c’est l’arrestation et le désarmement de tous les gens suspects qui abondent à Paris, et qui n’aspirent qu’à allumer la guerre civile.

« Le Conseil arrête : 1o qu’après le recrutement, il sera organisé une armée révolutionnaire soldée, qui sera de service à Paris, et qui sera toujours en état de réquisition ; 2o que le désarmement et l’arrestation des gens suspects soient dévolus au maire et à l’administration de la police, et que le mode en sera discuté dans le secret. »

Ce rapport de police tendant à armer et subventionner le prolétariat révolutionnaire n’est pas banal ; et sans doute depuis un siècle, les spécimens de ce genre de littérature n’abondent pas. C’est la mise en œuvre, par la Commune, de la politique conseillée aux Jacobins par Robespierre dans son discours du 8 mai. Mais qui ne sent que, tandis que Robespierre voulait surtout prendre des mesures de précaution, et ne se prétait pas encore à l’emploi de la violence contre une partie de la Convention, la Commune sera entraînée à