Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/470

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acceptées par lui, et la force armée de Paris se trouvait sans chef. Par là l’autorité impersonnelle de la Convention était accrue : quel était le chef de section, désigné par l’âge pour le commandement, qui aurait refusé de transmettre et d’exécuter ses ordres ? Du moins, la Commission des Douze l’espérait. Elle espérait aussi que les sections, isolées les unes des autres, et ne pouvant plus prolonger leurs séances au delà de l’heure où les « hommes d’ordre » rentraient d’habitude chez eux, seraient dominées de nouveau par les influences bourgeoises et modérées.

Le même jour, la Convention félicitait la section de la Fraternité, pour avoir dénoncé le complot de l’assemblée de la mairie. La Commune, sentant la gravité du coup qui était porté et voulant réduire à sa juste mesure la prétendue « conspiration », adresse un ultimatum à la section de la Fraternité :

« Le Conseil général instruit qu’une députation de la section de la Fraternité a dénoncé à la Convention nationale un complot affreux, tendant à faire égorger des représentants du peuple et à faire dire ensuite qu’ils étaient émigrés ;

« Considérant qu’il est instant de faire arrêter sur-le-champ les auteurs de complots aussi abominables, invite les rédacteurs et porteurs de cette adresse à lui donner les renseignements nécessaires pour qu’il puisse découvrir les traîtres et les livrer ce soir aux tribunaux. »

C’était habile, car la section de la Fraternité serait obligée ou de s’en tenir à des déclarations vagues ou de réduire l’incident en précisant les propos de Marino et de Michel. De plus, la Commune se donnait l’air d’être empressée à réprimer le complot, si seulement on daignait le lui faire connaître.

La section de la Fraternité éluda la difficulté par une réponse savamment ironique, où se révèle déjà la manière mesurée et hautaine de Royer-Collard :

« L’assemblée arrête à l’unanimité qu’il sera répondu au Conseil général que l’administrateur de police qui a présidé dimanche, à la mairie, l’assemblée des membres du comité révolutionnaire, et le maire, qui a présidé la même assemblée lundi, peuvent lui donner tous les renseignements nécessaires.

« L’assemblée s’empresse également d’instruire le Conseil que la Convention nationale a décidé ce matin que la section de la Fraternité a bien mérité de la patrie. »

Mais, s’il y a eu, dans une assemblée de délégués révolutionnaires, une provocation directe au meurtre de quelques Girondins, toutes les violences des journalistes et des orateurs, tolérées jusque-là, ne sont-elles point une partie du complot ? Qu’on arrête donc ces fauteurs d’assassinat et qu’on les juge. La Commission des Douze n’osait pas frapper Chaumette. Celui-ci, assailli depuis quelques jours par les calomnies les plus violentes, obligé de