Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/514

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

se débarrasser elle-même de la faction girondine. La parole était au peuple. Mais ce n’est pas de la Commune non plus où Chaumette pérorait vraiment trop, que partira le signal. Dans la séance du 28, il se répand en interminables homélies ; et il donne au retour d’Hébert un air de fête pastorale et une fadeur idyllique.

« Le rapport de la Commission des passe-ports est interrompu par un long discours prononcé par Chaumette sur les dangers de la patrie, sur la défense et la proclamation des principes, sur la violation des droits de l’homme… Il entre dans des détails sur le complot qui se trame contre la liberté, il dénonce Lebrun et Clavière… Il finit en disant que malheureusement pour la République, les passions dominent encore ; mais quelles que soient leurs influences, dit-il, tenons-nous fermes ; qu’Hébert sorte ou non de la prison, restons à notre poste. Le peuple saura venger ses droits violés ; mais surtout point d’armes, point de sang (Vifs applaudissements). Je n’aime pas le sang : les applaudissements qui éclatent ici de toutes parts prouvent que personne ici n’aime le sang. Où est notre force ? Elle est dans notre union… Je vais vous expliquer ce mouvement : c’est que Hébert arrive.

« À neuf heures moins un quart, Hébert entre dans la salle, de nombreux applaudissements se font entendre. Ses collègues l’embrassent ; on lui met le bonnet rouge sur la tête, il est quelque temps sans parler.

« Chaumette continue et dit : « Vous le savez, citoyens, je défendais les principes, je ne défendais pas Hébert ; il faut faire triompher les principes, en faisant punir ceux qui les attaquent… « Sur son réquisitoire le Conseil arrête : 1o que des commissaires rédigeront une pétition à la Convention, dans laquelle ils demanderont que la conduite inquisitoriale du Comité des Douze soit sévèrement examinée et qu’extrait en sera envoyé aux départements ; 2o qu’après cet examen les membres dudit Comité seront dénoncés aux tribunaux, et que leur procès leur soit fait comme à des oppresseurs de la liberté ; 3o que le Conseil ne fera aucune poursuite contre les sections égarées qui l’ont dénoncé, mais seulement contre la Commission inquisitoriale.

« Hébert prend la parole ; il dit que son premier devoir était de se rendre à son poste, qu’il lui reste à s’acquitter d’un devoir difficile, celui d’exprimer au Conseil ses sentiments de reconnaissance ; il demande que l’on fasse l’historique de l’inquisition des Douze ; qu’il soit porté par des courriers dans les départements ; que le peuple soit invité à se tenir toujours debout et à chasser des assemblées des sections tous les intrigants ; que l’on désarme les gens suspects et que leurs armes soient distribuées aux sans-culottes. On ne donne aucune suite à ces propositions…

« Chaumette annonce qu’il a reçu une députation bien enguenillée, qui lui apportait une couronne pour Hébert : « Rousseau, dit-il, fut condamné par le Sénat de son pays, il défendit et le Sénat et son pays » ; il remet cette couronne entre les mains d’Hébert ; celui-ci monte à la tribune, en descend le buste de