Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/930

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dans le cours de la troisième décade de pluviôse s’élèvent, pour cent cinquante-trois districts, à 23 886 997 livres 6 sous 8 deniers, sur une estimation de 11 084 143 livres 14 sous 7 deniers, et présentent un excédent de 12 802 853 livres 11 sous 9 deniers sur cette estimation (comme on voit, un peu plus du double).

« La totalité des adjudications prononcées jusqu’à ce jour, pour trois cent quarante-quatre districts situés dans l’étendue de quatre-vingt-trois départements, s’élève à 127 885 145 livres 2 sous 8 deniers, et elle excède de 64 225 244 livres 16 sous 9 deniers le montant des estimations. (Pour l’ensemble aussi c’est un peu plus du double).

« Le résultat des détails que contiennent les lettres des districts présente le même intérêt que celui de leurs opérations.

« Partout l’ardeur des acquéreurs est égale à l’activité des corps administratifs, partout l’enthousiasme républicain anime les enchères et tout se fait aux cris de : « Vive la République ! Vive la Nation ! »

Il en avait toujours été ainsi, et une des preuves les plus curieuses et les plus décisives qu’on en puisse donner, c’est que, au commencement de l’année 1793, Delcher avait demandé la suspension d’une loi coutumière du Midi qui permettait aux vendeurs de réclamer la rescision de la vente si, dans les dix ans qui suivaient, le domaine avait été revendu à des prix sensiblement supérieurs.

Beaucoup de vendeurs dans le Midi voulaient profiter de la hausse des terres survenue depuis la Révolution pour obtenir l’annulation de la vente. Cette hausse était beaucoup plus significative encore et plus réelle en 1794, à un moment où le crédit de l’assignat restauré atteignait presque au pair.

Il semble donc que le Trésor révolutionnaire recevait, en échange du domaine aliéné, des valeurs importantes, et en une monnaie qui avait retrouvé son cours d’émission. De plus si on prend la peine de lire dans le détail les registres de ventes publiés pour les biens des émigrés comme pour les biens d’Église, par Rouvière pour le Gard, par Legeay pour la Sarthe, on constate que ces ventes sont l’occasion d’un morcellement assez marqué de la propriété du sol. Presque jamais l’ensemble du domaine d’un émigré n’est acquis par un seul acheteur. La division par lots favorisait le morcellement de la vente ; et qui sait d’ailleurs si les acheteurs ne se sentaient pas plus rassurés par leur nombre contre l’hypothèse de revendications ultérieures ? Ils formaient à plusieurs comme une société d’assistance contre toute tentative de reprise.

Les registres des ventes de la Haute-Garonne que j’ai parcourus aux archives de Toulouse m’ont donné, pour les biens d’émigrés les mêmes résultats que pour la Sarthe et le Gard.

Il n’est pas rare qu’à un propriétaire unique se substituent jusqu’à une