Page:Jean Charles Houzeau - La terreur blanche au Texas et mon évasion, 1862.djvu/109

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dans un des territoires de l’ouest, où l’esclavage à temps est substitué à ce que nous appelons en Europe la contrainte par corps. Enfin, on en vient franchement à la servitude du blanc, du blanc pauvre. Une tentative odieuse a été faite pour rétablir l’esclavage au Mexique septentrional. La guerre civile y a été provoquée dans ce but et soutenue par les subsides, les armes, la poudre des planteurs. Matamoros, où je suis, est en ruines, après trois mois d’une lutte proportionnellement plus meurtrière que les guerres de l’Empire, trois mois d’une guerre de rues comme celle de Saragosse. Malgré les canons américains, malgré les trahisons du clergé catholique, l’héroïque population de cette ville, qui a du sang indien dans les veines, a repoussé les brigands qui lui étaient lancés du Texas.

Que pouvais-je faire au milieu de ces troubles ? Mon humble avoir était retombé au pouvoir des sauvages; j’avais vu plusieurs de mes voisins périr dans leurs champs, quelques-uns scalpés. D’autres sont tombés sous la hache des rangers furieux, parce qu’ils étaient « unionistes.» J’ai vu tuer Bob Augustin à coups de couteaux sur les marches de la justice de paix de San Antonio. J’ai vu un autre citoyen, poursuivi à coups de revolver dans les rues de cette petite ville, marquer le pavé de sa trace sanglante, et expirer au coin du marché. Que pouvais-je faire? Disons plutôt que devais-je faire? Le devoir était tout tracé… J’ai bientôt été forcé de quitter ma demeure, par une nuit d’hiver, afin de laisser au terrible comité de vigilance et de salut public quatre murs vides et la cendre de mes papiers.