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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/314

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de sagesse et enseignait la foule ; celui-ci, le don des guérisons, et guérissait les malades ; celui-là, le don des vertus et ressuscitait les morts ; un autre, celui des langues, et parlait différents dialectes. En outre il y avait le don de prière, qu’on appelait aussi esprit ; et celui qui l’avait, priait pour tout le peuple. Car, comme dans l’ignorance où nous sommes de beaucoup de choses utiles, nous en demandons qui ne le sont point, le don de prière venait en l’un d’eux, et celui-ci, se tenant debout, demandait ce qui était avantageux pour toute.1 'Enlise et instruisait les autres à en faire autant. Or ici l’apôtre appelle esprit ce don même, et l’âme qui, l’avant reçu, priait Dieu et gémissait. Celui qui avait été honoré de cette grâce, debout dans des sentiments de vive componction, se prosternant ensuite devant Dieu avec de grands gémissements intérieurs, demandait des choses utiles à tous. Nous en avons encore une figure dans le diacre qui prie pour le peuple. Et c’est ce que Paul entend quand il dit : « L’Esprit lui-même demande pour nous par des gémissements inénarrables. Mais celui qui scrute les cœurs… (26, 27) ».
Voyez-vous qu’il ne s’agit pas ici du Paraclet, mais du cœur inspiré par l’Esprit-Saint ? Autrement il aurait fallu dire : Celui qui scrute l’Esprit. Et pour vous faire comprendre qu’il parle de l’homme spirituel et de celui qui a le don de prière, il ajoute : « Celui qui scrute les cœurs sait ce que désire l’Esprit », c’est-à-dire, ce que désire l’homme spirituel. « Qui demande selon Dieu pour les saints ». Non pas, nous dit Paul, qu’il apprenne à Dieu quelque chose que Dieu ignore ; mais c’est pour nous apprendre à demander à Dieu ce qui est conforme à sa volonté : car c’est là le sens de ces mots : « Selon Dieu ». En sorte que cela avait lieu pour la consolation des assistants et pour enseigner la perfection : en effet, celui qui distribuait ces dons et ces biens sans nombre, c’était le Paraclet. Or, nous dit Paul, « tous ces dons, c’est le seul et même Esprit qui les opère » (1Cor. 12,11). Et tout cela a pour but de nous instruire et de nous prouver combien l’Esprit nous aime, puisqu’il porte jusque-là la condescendance. Aussi celui qui priait était-il exaucé, parce qu’il priait selon Dieu. Voyez-vous par combien de preuves l’apôtre démontre l’amour de Dieu pour eux et l’honneur qu’il leur fait ?
8. En effet, qu’est-ce que Dieu n’a pas fait pour nous ? Il a fait le monde corruptible à cause de nous, puis incorruptible encore à cause de nous ; pour nous il a permis que tes prophètes fussent maltraités ; pour nous il les a envoyés en captivité, lassé jeter dans la fournaise, subir des maux sans nombre. Pour nous il a fait les prophètes, pour nous il a fait les apôtres ; pour nous il a livré son Fils unique ; pour nous il punit le démon ; il nous a fait asseoir à sa droite ; pour nous il a été couvert d’opprobre : car il est écrit : « Les injures de ceux qui vous injuriaient sont retombées sur moi ». (Ps. 68) Et quand, après tant de bienfaits, nous nous éloignons de lui, il ne nous abandonne pas ; il nous rappelle, il nous procure des intercesseurs, afin de pouvoir nous rendre sa grâce : comme on le voit par l’exemple de Moïse, à qui il disait : « Laisse-moi agir et je les détruirai » (Ex. 32,10), afin de l’exciter à prier pour les coupables ; et c’est ce qu’il fait, encore aujourd’hui. C’est pour cela qu’il a accordé le don de la prière ; non pas qu’il ait besoin de supplications, mais de peur que, une fois sauvés, nous ne retombions dans un état pire : C’est pour cela que souvent il se déclare réconcilié avec les pécheurs à causé de David, à cause d’un tel ou d’un tel, dans l’intention de donner un modèle d’intercession ; bien que sa bonté éclaterait davantage s’il déposait sa colère de lui-même et non par l’entremise d’un tel et d’un tel. Mais il ne l’a pas voulu, de peur que ce mode de réconciliation ne servît de prétexte à notre lâcheté. Voilà pourquoi il disait à Jérémie : « Ne prie point pour ce peuple, car je ne t’exaucerai pas » (Jer. 11,14) ; non pour l’empêcher de prier, (il désire vivement notre salut), mais pour les épouvanter : ce que le prophète savait bien, car il ne cessait pas de prier. Et pour preuve que Dieu ne voulait point l’empêcher de prier, mais seulement le faire rougir, écoutez ce qu’il dit : « Ne vois-tu pas ce qu’ils font ? » Et s’il dit, en parlant de Jérusalem : « Quand même tu te laverais avec du nitre et amoncellerais l’herbe sur toi, tu es souillée devant mes yeux » (Id. 11,22), ce n’est point pour la jeter dans le désespoir, mais pour l’exciter au repentir.
En effet, comme il frappa les Ninivites d’une plus grande épouvante et les amena à la pénitence en lançant contre eux un arrêt qui n’exceptait personne et ne laissait aucune espérance ;