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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 4, 1864.djvu/38

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disparaissent de notre mémoire presque aussitôt qu’ils nous ont quittés, c’est pour perpétuer ce souvenir, que le Christ dit : Ne péchez plus, de peur qu’il ne vous arrive encore pis.
3. La sollicitude et la douceur du Seigneur ne se montrent pas moins dans l’espèce de reproche qu’il adresse au paralytique, que dans la précaution qu’il prend de l’avertir. Car il ne divulgue pas ses péchés, il lui dit seulement que ce qu’il souffre, il le souffre à cause de ses péchés ; quels sont ces péchés, il ne l’a pas dit ; il n’a pas dit : tu as commis telle et telle faute, telle et telle iniquité, mais après l’avoir indiqué par ce simple mot : Ne péchez plus, et lui avoir dit une parole dont le souvenir le rendrait plus circonspect, il nous montre sa patience, son courage, sa vertu, en le mettant dans la nécessité de dévoiler tout son malheur et de parler de sa constance : car, dit-il, tandis que je viens, un autre descend avant moi ; mais quant à ses péchés, Jésus-Christ ne les découvre pas. Si nous voulons cacher nos iniquités, Dieu le désire bien plus encore que nous la guérison, c’est en public qu’il l’opère ; l’exhortation et le conseil, c’est en particulier qu’il les donne ; jamais il ne découvre nos fautes, à moins que quelquefois il ne nous y voie insensibles. Car lorsqu’il dit : Vous avez vu que j’avais faim et vous ne m’avez point donné à manger, que j’avais soif et vous ne m’avez point donné à boire (Mat. 25, 42), il le dit dans le temps présent pour que nous n’ayons pas à l’entendre dans le temps futur. Il menace, il démasque aujourd’hui afin de n’avoir rien à dévoiler au jugement, comme il a menacé de ruine la ville de Ninive précisément afin de prévenir cette ruine. S’il voulait publier nos péchés, il n’aurait pas annoncé qu’il les publierait ; mais s’il l’annonce, c’est pour que la crainte de la manifestation, sinon celle de la punition, nous ramenant à de sages sentiments, nous les effacions tous. C’est ce qui arrive au baptême ; il admet l’homme à ce bain salutaire sans faire connaître ses iniquités à personne, il ne rend public que le pardon, et quant aux péchés, personne ne les connaît que lui et celui à qui ils sont remis. C’est ce qui est arrivé en cette circonstance : il blâme le paralytique quand il n’y a pas de témoin ; ou plutôt ce n’est pas un blâme, c’est presque une apologie pour lui donner la raison dé cette longue affliction, lui dire et lui montrer que ce n’est pas en vain qu’il a voulu le faire si longtemps souffrir, il le fait souvenir de ses fautes et lui dit la cause de sa maladie : L’ayant trouvé dans le temple, dit l’Évangéliste, Jésus lui dit : Ne péchez plus de peur qu’il ne vous arrive encore pis.
Puisque nous avons retiré tant de profit de l’histoire de ce premier paralytique, allons nous instruire auprès de l’autre, celui dont parle saint Matthieu. (Mat. 9) Car, dans les mines, c’est aux endroits où l’on a déjà trouvé de l’or qu’on va plutôt fouiller de nouveau. Je sais que plusieurs de ceux qui lisent sans beaucoup réfléchir, pensent qu’il ne s’agit dans les quatre évangélistes que d’un seul et même paralytique, mais cela n’est pas. Renouvelez ici votre attention. Ce n’est pas ici une recherche inutile ; une solution convenable nous sera une arme de plus contre les Gentils, contre les Juifs et contre la plupart des hérétiques. Car tous reprochent aux évangélistes de n’être pas d’accord entre eux. Mais grâce à Dieu, ce reproche est entièrement faux ; si les auteurs sont différents, la grâce du Saint-Esprit est une, cette grâce qui a dirigé les évangélistes : or là où est la grâce du Saint-Esprit, là est l’amour, la charité, la paix, et non la guerre, la discorde, la lutte et le combat. Comment montrerons-nous que ce n’est pas du même paralytique qu’il s’agit ? Par bien des arguments tirés du lieu, du temps, des circonstances, du jour, enfin de la manière dont la guérison s’est opérée, dont le médecin est arrivé, dont le malade gisait abandonné. – À quoi bon cette démonstration, me dira-t-on ? N’y a-t-il pas beaucoup de miracles qui sont rapportés différemment par les divers évangélistes ? – Sans doute, mais autre chose est de parler d’une manière différente, autre chose de parler d’une manière contradictoire ; des différences ne sont pas des démentis : au contraire, dans ce que nous examinons, il n’y a que contradictions, si l’on n’admet pas que le paralytique de saint Matthieu n’est pas celui dont ont parlé les trois autres évangélistes. Et afin que vous compreniez mieux que parler d’une manière différente n’est pas parler d’une manière contraire, citons des exemples. Un évangéliste dit que Jésus porta sa croix, un autre que ce fut Simon le Cyrénéen, et il n’y a pas la de désaccord, pas d’opposition. – Mais ne sont-ce pas deux choses évidemment contraires que porter et ne pas porter ? – Non ; l’une a eu lieu aussi bien que l’autre. Quand on sortit du prétoire,