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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 4, 1864.djvu/44

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quelquefois forcé de prendre votre repos avant d’avoir apaisé votre faim ? Venez ici, entendez saint Paul, nous disant qu’il a vécu dans la faim, la soif, la nudité, non un jour, ni deux, ni trois, mais toute sa vie (c’est en effet ce que signifient ces paroles : Jusqu’à cette heure nous souffrons la faim, la soif, la nudité). (1Co. 4, 11) Vous vous sentirez assez consolé en voyant dans mes instructions que, si Dieu vous laisse souffrir de la faim, ce n’est pas qu’il vous haïsse ou qu’il vous abandonne. Si c’était un effet de sa haine il ne l’aurait pas fait supporter à saint Paul, celui des hommes qu’il chérit le plus : il n’agit ainsi que par intérêt, par bienveillance, pour nous porter à une perfection plus grande. Votre corps est-il assiégé par la maladie et par mille autres maux, vous serez consolé en voyant ces deux paralytiques, et avec eux le grand, le noble disciple de saint Paul, qui vécut dans de continuelles infirmités, à qui la maladie ne laissa pas un instant de relâche, comme saint Paul nous l’apprend par ces paroles : Usez d’un peu de vin, à cause de votre estomac et de vos fréquentes infirmités (1Co. 4, 11), fréquentes, nous dit-il. Votre honneur est-il attaqué publiquement par la calomnie, et ses attaques sont-elles assez vives pour agiter et tourmenter votre âme, venez et écoutez : Vous êtes heureux, lorsque les hommes vous maudissent et disent faussement toute sorte de mal de vous ; réjouissez-vous et tressaillez de joie, parce que votre récompense est grande dans les cieux (Mat. 5,11-12) ; et alors votre tristesse disparaîtra et vous serez comblés de joie : Réjouissez-vous et tressaillez, lorsqu’ils vous injurieront. (Luc. 6, 22-23) Voilà comme il console ceux qui sont calomniés et voici comme il enraye les calomniateurs : Toute parole oiseuse que les hommes auront prononcée, ils en rendront compte (Mat. 12, 36), qu’elle soit bonne ou mauvaise. Avez-vous perdu votre épouse, votre fils, un de vos parents, entendez saint Paul gémissant sur la vie présente, appelant de tous ses vœux la vie future, affligé de se voir retenu ici-bas, et vous sentirez votre peine adoucie par ces mots : Je ne veux pas, mes frères, que vous soyez dans l’ignorance touchant ceux qui dorment, afin que vous ne vous attristiez pas, comme font tous les autres qui n’ont pas d’espérance (1Th. 4, 12) Il ne dit pas touchant ceux qui sont morts, mais ceux qui dorment, pour montrer que la mort n’est qu’un sommeil. Lorsque nous voyons quelqu’un dormir, nous restons sans trouble, sans abattement, parce que nous savons qu’il se réveillera ; de même, lorsque nous voyons quelqu’un mort, nous n’éprouvons pas de trouble, pas d’abattement ; ce sommeil, pour être long, n’en est pas moins réellement un sommeil. Par ce mot de sommeil, il console les fidèles affligés et répond aux accusations des infidèles. Si vous pleurez d’une douleur inconsolable celui qui vous a quitté, vous ressemblez à cet infidèle qui ne croit pas à la résurrection. C’est avec raison qu’il pleure puisqu’il ne trouve dans l’avenir rien qui le rassure ; mais pour vous que tant de preuves ont dû convaincre de la réalité d’une vie future, pourquoi tomber dans le même découragement ? C’est pour cela qu’il dit : Je ne veux pas que vous soyez dans l’ignorance touchant ceux qui dorment, afin que vous ne vous attristiez pas, comme font les autres qui n’ont pas d’espérance.
Ce n’est pas seulement le Nouveau, c’est encore l’Ancien Testament qui nous présentera de douces consolations. En voyant Job après la ruine de sa fortune, la perte de ses troupeaux, la mort, non d’un, ni de deux, ni de trois de ses enfants, mais de tous, enlevés à la fleur de l’âge, en le voyant, dis-je, montrer tant de courage, fussiez-vous le plus pusillanime des hommes, il vous sera facile de maîtriser votre douleur et de la supporter. Car, vous, vous avez assisté à la dernière maladie de votre enfant, vous l’avez vu reposant sur son lit, vous avez entendu ses dernières paroles, recueilli son dernier soupir, fermé ses yeux et sa bouche. Et ce patriarche ne vit pas l’agonie de ses enfants, n’assista pas à leurs derniers instants ; tous ils n’eurent qu’un même tombeau, leur propre maison, et sur la même table ce fut un mélange informe de têtes brisées, de sang répandu, de poutres, d’argile, de poussière, de chairs broyées. Et pourtant après une si grande épreuve, il ne se laisse aller ni aux gémissements, ni au désespoir ; mais que dit-il ? Le Seigneur m’a donné, le Seigneur m’a ôté, la volonté du Seigneur s’est accomplie : que le nom du Seigneur soit béni dans tous les siècles ! (Job. 1, 21) Que ces paroles soient les nôtres en toute circonstance ; quelque malheur qui nous arrive, perte de biens, maladies, épreuves, calomnies, affliction quelle qu’elle soit, disons toujours : Le Seigneur m’a donné, le Seigneur m’a ôté, la volonté du Seigneur s’est accomplie ; que le nom dit Seigneur soit béni dans toits les siècles ! Si telle est notre sagesse,