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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/373

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les peuples et les rendra semblables à vous, Ne craignez donc point tous les maux que je vous prédis. Tous ces obstacles seront votre gloire et vous surmonterez tous vos ennemis.
Dans ces mesures de farine, le nombre de « trois » est mis pour un grand nombre comme c’est l’ordinaire dans l’Écriture.
Ne vous étonnez point, mes frères, que Jésus-Christ, découvrant aux hommes les plus grands mystères de son royaume, leur parle si « de sénevé et de levain. » Il parlait à des personnes grossières et ignorantes, qui avaient besoin de ces sortes de comparaisons. Ils étaient si peu éclairés, qu’après même des paraboles si simples, ils avaient encore besoin qu’on leur en donnât l’éclaircissement.
Où sont maintenant les Grecs ? Qu’ils reconnaissent enfin la puissance de Jésus-Christ, en voyant que l’événement a justifié ses prophéties. Qu’ils le reconnaissent enfin et qu’ils l’adorent en voyant ce double miracle ; le premier qu’il a prévu et qu’il a prédit une chose si incroyable ; et le second qu’il l’a accomplie de la même manière qu’il l’avait prédite. C’est lui qui donne à ce levain cette force secrète et invisible. C’est lui qui veut encore aujourd’hui, que ceux qui lui sont fidèles, soient mêlés avec la multitude des hommes du siècle, afin qu’ils soient comme un levain sacré qui leur communique la vertu et la sagesse. Qu’on ne se plaigne donc point du petit nombre des apôtres, puisque la vertu de leur parole a eu tant de force.
Ce qui a été une fois pénétré par le levain se change en levain. La prédication est comme une étincelle de feu qui s’attache à un bois sec. Elle l’enflamme premièrement et fait qu’il brûle ensuite le bois le plus vert. Jésus-Christ néanmoins ne se sert pas de cette comparaison du feu, mais de celle du levain, parce que lorsqu’un bois sec est embrasé, sa sécheresse est cause en partie de ce qu’il brûle, au lieu que c’est le levain qui fait tout dans le changement qu’il cause dans la pâte.
Que si douze hommes autrefois ont été le levain qui a changé et sanctifié toute la terre ; jugez, mues frères, quelle doit être notre corruption et notre lâcheté, si maintenant que nous sommes un si grand nombre de chrétiens, nous ne pouvons servir de levain pour convertir ce qui reste, nous qui devrions être assez saints pour servir à la conversion de dix mille mondes !
3. Mais ces douze hommes, dites-vous, étaient des apôtres. Il est vrai ! Mais n’étaient-ils pas hommes comme vous ? n’avaient-ils pas été élevés au milieu des villes ? n’avaient-ils pas usé des mêmes biens ? n’avaient-ils pas été engagés dans les mêmes arts ? Était-ce des auges descendus du ciel ? Vous me direz qu’ils faisaient des miracles, Et moi je vous réponds que les miracles n’ont pas été ce qu’il y a eu de plus admirable dans eux,
Jusqu’à quand, mes frères, chercherons-nous dans ces miracles un prétexte à notre mollesse ? Que ne regardez-vous ce grand nombre de saints qui n’ont jamais fait aucun miracle ? Ne savez-vous pas que plusieurs de ceux mêmes qui ont chassé les démons, sont ensuite tombés dans le péché et, qu’au lieu de s’attirer l’admiration des hommes, ils n’ont attiré sur eux que la colère de Dieu ? Qu’y a-t-il donc eu dans les apôtres, me direz-vous, qui les a si fort relevés au-dessus des hommes ? C’est le mépris qu’ils ont fait de l’argent. C’est l’éloignement qu’ils ont eu de la gloire ; c’est le retranchement de tous les soins et de toutes les affaires du monde. Si, au lieu d’avoir de telles dispositions, ils eussent été assujettis aux mêmes passions que nous, quand ils auraient ressuscité mille morts, bien loin d’en tirer quelque avantage ils n’auraient passé que pour des fourbes et pour des séducteurs. C’est donc par la sainteté de la vie, que l’homme brille et éclate véritablement : c’est par la sainteté de la vie qu’il attire la grâce du Saint-Esprit. Quel miracle a fait saint Jean qui a instruit tant de villes ? L’Évangile ne dit-il pas clairement : « Que Jean n’a fait aucun miracle ? » (Jn. 10,41) Qui a rendu Élie si admirable, sinon cette liberté qu’il a fait paraître en parlant aux rois ? ce zèle qu’il a eu pour Dieu ? ce renoncement à toute chose ? ces habits austères, ces peaux de bêtes dont il se couvrait et ces lieux sauvages où il demeurait ? Tous les miracles qu’il a faits depuis sont beaucoup moindres que sa vie, puisqu’ils n’en ont été qu’une suite.
Quel miracle le démon a-t-il vu dans le bienheureux Job qui l’ait irrité contre ce saint homme ? Il n’a point été frappé d’aucun prodige qu’il eût fait ; mais il a été surpris de voir en lui une vie si sainte et un cœur aussi ferme que le diamant. Quel miracle avait fait David, étant encore tout jeune, pour obliger Dieu de dire : « J’ai trouvé David, fils de Jessé, un homme