Page:Jeanne Landre-Echalote et ses amants 1909.djvu/99

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le cinq à sept de ces dames

un sacerdoce ! À notre époque on est courtisane par paresse et non point par amour de l’amour ; on offre ses faveurs comme on vendrait des légumes, avec l’arrière-pensée de tromper le client. Ô ! mânes de Thaïs et d’Aspasie, où donc êtes-vous pour ne pas veiller sur vos imitatrices et faire en sorte qu’elles ne dilapident pas tout à fait ce que vous leur avez transmis de sorcelleries et de philtres. Les philtres, elles ne les connaissent plus que pour terminer leur déjeuner matinal chez le traiteur du coin : « Garçon, un café-filtre ! Et bien passé, c’est pour une malade ! » oui, voilà comment elles perpétuent les traditions et où elles laissent choir les légendes. Et si encore leur bêtise, se contentant d’ignorer leurs plus élémentaires devoirs, ne tentait pas à son tour de transformer les coutumes et d’apporter des améliorations à leurs tâches. Et quelles améliorations ! L’éther, qu’elles achètent au litre, et la cocaïne, qu’un sourire au premier potard leur fait immédiatement délivrer. Regardez leurs yeux, humez leur haleine. Elles sont saturées de poison, comme si celui de leur conscience ne leur suffisait pas ! Et l’on dit que le métier de souteneur est une sinécure ! Ah ! comme on voit bien que ceux qui le dénigrent ne l’ont jamais exercé et ne le connaissent pas ! Mais sans eux, madame, où tomberaient vos congénères ? mais sans eux, monsieur, que pourriez-vous attendre de nos dames d’amour ?

Ainsi soliloquent les consommateurs de Tabarin en regardant bostonner leurs amies.

Certes, ils préféreraient les savoir occupées à tout

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